Mc Evoy 1927-29: JAP en V, 4 cylindres et mono maison

Tout semblait bien parti et Mc Evoy s’affirmait comme l’un des grands de la moto britannique super sport de haut luxe, la belle histoire a, hélas, tourné court.

Mc Evoy 1000 JAP 1927 Special Long stroke 8/45 et side Montgomery. Cette version à moteur JAP Vulpine alimentée par deux Amal double cuve promettait 177 km/h en solo et valait 177 £ contre 130 £ pour la 1000 8/45 standard.

En 1927, Alessandro Anzani, qui fête son cinquantième anniversaire, a vendu ses usines de Paris (Courbevoie) et Londres pour ne garder que sa fabrique italienne à Monza. Les activités de British Anzani ne s’arrêtent pas pour autant, bien au contraire, mais la firme ne propose plus de gros bicylindres en V concurrentiels. Il n’est d’autre solution pour Mc Evoy que de se tourner vers JAP… comme Brough Superior et tout s’annonce pour le mieux. Les succès en course se poursuivent et Michael lui-même s’octroie un record sur cinq tours à Brooklands au guidon d’une 980 cm3 à moteur JAP à la moyenne de 149,9 km/h. À l’Olympia show de 1926, la gamme s’agrandit avec, sur le stand Mc Evoy, deux V twins dont un 980 JAP garanti pour plus de 160 km/h , deux monocylindres 500 cm3 et trois 350. Les records sont alors le moteur des ventes, hélas les tentatives de Mc Evoy avec un V twin JAP à compresseur type Roots alimenté par deux carburateurs Binks ne donnent pas entière satisfaction. George W. Patchett et lui doivent se contenter d’un record national sur la piste d’Oostmalle en Belgique sur le mile et le kilomètre à 185 km/h avec un moteur sans compresseur. Nouveau coup du sort, Archie Birkin se tue aux essais du TT 1927 sur sa Mc Evoy privant la marque de son principal soutien financier.

Mc Evoy présente pourtant au salon de Londres fin 1927 une gamme encore plus ambitieuse avec de nouveaux bicylindres JAP, un 980 cm3 annoncé pour 176 km/h doublé d’une version sage à soupapes latérales et d’une 680 cm3. Il s’y ajoute deux monocylindres culbutés de 350 et 500 cm3 et un inattendu Super Sport deux-temps à moteur Villiers 175 cm3.

Page publicitaire pour JAP dans le numéro Spécial salon 1928 de Motor Cycle
La 175 Mc Evoy Super Sport à moteur Villiers de 1927. La hauteur de selle n'est que de 600 mm
La Mc Evoy 1000 JAP de record conservée au musée national de la moto de Birmingham avec ses monstrueux silencieux exigés pour tourner sur l’anneau de Brooklands. Mc Evoy lui-même se distingua sur l’anneau au guidon d’une machine similaire en couvrant cinq tours à 162,25 Km/h de moyenne, dont un à 170,9 km/h.
Le bicylindre JAP de la Mc Evoy 1927 est un 996 cm3 longue course (80 x 99 mm) développant environ 50 chevaux. La magnéto latérale est entraînée par couple conique, graissage à huile perdue, boîte Sturmey Archer 3 rapports. Étonnamment, Mc Evoy célèbre dans ses débuts pour ses cadres à double ou triple berceau est revenu à un classique simple berceau dédoublé.
Détail du 1000 cm3 JAP à compresseur monté en 1926 sur la moto de Claude Temple. Le compresseur type Roots alimente les deux carbus via une chambre de tranquilisation de 2 litres.
Les essais de compresseur tentés par George Patchett et Mc Evoy sur la base d’un bicylindre JAP de 980 cm3 ne furent guère concluants. George Patchett ici au guidon à Oostmalle en Belgique courra finalement sans compresseur. (Photo archives Doctor Joseph Bayley)

Dès 1927, Mc Evoy en mal de publicité se lance à corps perdu dans un nouveau sport qui fait fureur, le speedway. Mc Evoy lui-même participe en tant que pilote et la marque débute avec de nombreux succès. Les premières Mc Evoy de speedway ne sont que des modèles de série à moteur Blackburne légèrement transformées et débarrassées de tous leurs accessoires. On verra ensuite une version à moteur Rudge quatre soupapes sans doute jamais commercialisée, puis, en 1929, une expérience beaucoup plus innovante où, pour abaisser au maximum le centre de gravité, le cylindre passe à l’horizontale que ce soit le classique Blackburne, ou avec le nouveau bloc moteur maison. Cette recette sera par la suite souvent utilisée dans ce sport et l’idée était fameuse, malheureusement pour Mc Evoy les résultats ne suivirent pas. Il semble que Michael ait été victime de son manque d’expérience dans cette discipline, car il a dessiné, comme à son habitude, un cadre double berceau très rigide alors que le dirt-track réclame au contraire une partie cycle très flexible.

T.L. Cooper sur une Mc Evoy de production à moteur Blackburne 350 à double échappement remporte quatre 1ère places, dix 2e places et sept 3e places dans la saison 1927 de speedway.

En dépit de sa situation financière de plus en plus désastreuse, Mc Evoy tente le tout pour le tout et fait sensation au salon de Londres de 1928, en présentant un quatre cylindres en ligne de 594 cm3 qui va se doubler promet-il d’une version de 978 cm3. Conçues par HCM Beaumont, ces beaux quatre-cylindres baptisés Cyclone ont un bloc en aluminium avec la moitié supérieure du carter moteur intégrant des chemises en fonte (comme les Motobécane, deux ans plus tard). La 987 cm3 s’annonce à 150 £ et la 594 cm3 est affichée à 140 £. (À titre de comparaison une Henderson 1301 ne vaut alors que 130 £, une Brough Superior SS 80 à soupapes latérales 125 £ et la prestigieuse 1000 SS 100 : 170 £.) Le changement de cylindrée est obtenu par une simple modification de l’alésage qui passe de 52  x 70 mm pour la 594 cm3, à 67 x 70 mm pour la 978 cm3. À ce détail près, les deux machines semblent strictement identiques bien que de nombreux détails diffèrent entre le dessin publié par Motorcycle en 1928 et la photo apparue après le salon. La culasse fonte est monobloc avec des chambres hémisphériques, des soupapes inclinées commandées par un simple arbre à cames en tête entraîné par arbre et couples coniques situé devant le moteur et des culbuteurs semi-enfermés façon Nimbus. À droite du moteur, la magnéto et la dynastart sont entraînées par chaîne silencieuse. Le graissage s’effectue par pompe et carter sec, la boîte est une Sturmey Archer à trois rapports et un démarreur électrique (dynastart) est même proposé en option pour 10 £ de plus. La transmission finale s’effectue par chaîne et le cadre est un double berceau ininterrompu. Étonnamment, le poids annoncé n’est que de 120 kg avec une hauteur de selle de 650 mm et un empattement de 1420 mm. C’est vraiment une toute petite moto. On peut rêver. Pas sympa, George Brough qui présente au même salon sa 900 quatre-cylindres en ligne à soupapes latérales conçue par Bert Le Vack chez MAG (Motosacoche) visite le stand Mc Evoy et grattouille devant tout le monde le carter moteur avec un canif pour bien montrer que la belle fonderie n’est qu’une maquette en bois peinte couleur alu ! Un vrai gentleman. Une mésaventure qu’avait astucieusement évitée le même George Brough deux ans plus tôt, au salon de Londres de 1926, en exposant son projet de 1000 V4 dans une cage de verre. Les quatre-cylindres ne sont cependant pas les seules surprises sur ce stand Mc Evoy de 1928 qui présente aussi un monocylindre de 350 cm3 (70 x 90 mm) à trois soupapes commandées par ACT entraîné par arbre. Curieusement, il a deux soupapes à l’admission, mais un double échappement. Le bloc-moteur intègre une boîte Sturmey-Archer.

Sans la crise Mc Evoy serait, avec une telle gamme, devenu l'un des maitres du marché.
Les deux vedettes Mc Evoy du salon 1929 : la 1000 quatre cylindres et les 175 et 250 à moteur Villiers.
Ce dessin légendé 600 cm3 (publié dans le numéro du salon de MotorCycle du 8 novembre 1928) et la photo publiée ensuite et annoncée comme une 1000 cm3, différent sur de nombreux détails.
Sensation au salon de Londres de 1928 où Mc Evoy présente ses quatre-cylindres à simple ACT disponibles en 600 et 1000 cm3.

Les quatre-cylindres ne sont cependant pas les seules surprises sur ce stand Mc Evoy du salon 1928. Il présente aussi aux côtés de 175 et 250 cm3 à moteurs Villiers deux temps, un tout nouveau monocylindre à trois soupapes commandées par ACT entraîné par arbre. Mc Evoy affiche même un prix: 72 £. Ce 350 cm3 très moderne est traité en bloc moteur et intègre la boîte et l’embrayage Sturmey-Archer ainsi que la magnéto. Curieusement, il y a deux soupapes à l’admission, mais une seule à l’échappement qui possède pourtant une double sortie. La gamme continue de s’agrandir en dépit de la crise qui gronde, et le catalogue 1929 de Mc Evoy ne présente pas moins de 15 modèles. Aux côtés des vedettes, la 1000 quatre cylindres et les deux sportives légères 175 et 250 à moteur Villiers deux temps, il y a une gamme complète de trois 500 et deux 350 monocylindres quatre temps à moteurs Blackburne, latéral ou culbuté et à simple ou double échappement. Les six modèles de bicylindres en V sont, eux motorisés comme d’usage par JAP dans toutes ses variantes. And last but not least, comme disent nos amis britons, une pleine page du catalogue est consacrée à la nouvelle 350 dont le moteur maison à simple ACT a été présenté au salon 1928. Surprise, le bloc moteur est basculé et monté cylindre horizontal dans un large et tout aussi nouveau double berceau. Aucun de ces beaux projets ne verra malheureusement le jour et Mc Evoy, en grandes difficultés financières que la crise ambiante n’arrange pas, ferme ses portes en 1929. Michael Mc Evoy tirera profit de ses expériences de moteurs suralimentés en devenant importateur pour la Grande-Bretagne des compresseurs allemands Zoller.

Comme les Nimbus et, deux ans plus tard la Motobécane 750, le simple ACT est commandé par arbre et couples coniques devant les cylindres. La partie supérieure du carter intègre les cylindres chemisés fonte et la distribution est semi-enclose.
Autre nouveauté du salon de Londres de 1928, ce très (trop ?) moderne monocylindre à bloc moteur et trois soupapes commandées par simple ACT entraîné par arbre et couples coniques : deux soupapes à l’admission pour un seul carburateur, mais une à l’échappement pour deux sorties.
La révolutionnaire 350 Mc Evoy de 1929. Le bloc moteur maison à simple ACT est disposé horizontalement dans un large cadre double berceau.

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2 commentaires sur “Mc Evoy 1927-29: JAP en V, 4 cylindres et mono maison

  1. Michel Desmet dit :

    Bonsoir monsieur,

    Je vous remercie vivement pour ce magnifique article.

    Cordialement,

    Michel

  2. HELION Jacques-Philippe dit :

    Bravo et merci !
    Comme d’habitude, tres bon article, bien documenté et illustré.
    J’en redemande !!