L'image du cyclomoteur en France, ce sont la Mobylette et le Vélosolex. Ce dernier n'a pourtant pas inventé le concept, loin de là. Il s'est contenté, avec brio, de réaliser un Solex, simple et très fiable, au bon, moment et au bon prix. N'empêche que, dans toute l'Europe et en France en particulier, d'autres deux roues légers (on ne parle pas encore de cyclomoteurs) à transmission sur la roue avant ont eu leurs heures de gloire. C'est le cas du Cyclotracteur de 1919 à 1824 et de ses deux versions quasi identiques, les Tracteur amovible RM puis Mototracteur RM, en 1913 et 14..

L'idée d'un moteur adaptable sur toute bicyclette hante les inventeurs depuis les débuts du siècle. L'un des pionniers est Raymond Mauclaire à Argenteuil dans la banlieue parisienne, qui travaille depuis 1910 sur le prototype de son "Tracteur amovible R.M." avec lequel il obtient une médaille de vermeil au concours Lépine de 1913. Le Mototracteur RM commercialisé en 1914 restera sans grand changement. C'est un petit monocylindre quatre temps de 108 cm3 supporté par un châssis en tubes qui se fixe par l'intermédiaire de deux glissières au-dessus de la roue. La queue droite du vilebrequin reçoit un galet garni de caoutchouc qui entraîne directement la roue. Une manivelle actionnant une vis hélicoïdale permet de relever ou abaisser le moteur. L'allumage, qui s'effectuait par pile et bobine sur le prototype, a laissé place à une magnéto RM placée devant le cylindre et devant le carburateur relié par une longue pipe en boucle à la soupape d'admission automatique. Le galet d'entrainement n'est plus caoutchouté, mais en fonte et le réservoir d'essence cylindrique est placé en long à droite du moteur qui, lui, est déporté sur la gauche. 

La guerre porte, hélas, un sale coup aux projets d'expansion de Raymond Mauclaire bien que quelques-uns des premiers exemplaires soulageront quelques estafettes de notre armée. Mauclaire a perfectionné son équipage moteur, mais il est contraint d'en céder la fabrication à la fin des hostilités à la Compagnie Française des Automobiles de Place à Paris (ex-Société La Française qui produit les motos Diamant et future société des Taxis G7)). Le Mototracteur est rebaptisé Cyclotracteur et la production reprend dès 1919 après le salon. Peu de modifications : le réservoir d'essence cylindrique est désormais disposé transversalement au-dessus du moteur, la magnéto Déesse est entrainée par arbre et engrenages, le carburateur Fill sans cuve, mais avec un clapet de contrôle, émigre au-dessus de la soupape d'admission et le galet d'entrainement est dès lors en aluminium. En 1920, le châssis supportant le moteur reçoit une suspension à ressorts montée dans les haubans avant, remplacée en 1922 par un système sur biellettes. Limité à 30 km/h, le Cyclotracteur échappe à l'immatriculation. 

En 1922 le Cyclotracteur proposé en ensemble complet prêt à poser à 600 F et promu par une abondante publicité s'expose dans les vitrines de la Cie Française des Automobiles de Place au 42 avenue de la Grande Armée à Paris. En avril, il vaut 800 F avec la bicyclette , le même prix que son concurrent le Micromoteur de Labinal, lui aussi à moteur sur la roue avant. Pour comparaison, une BMA plus typée moto comme la Cyclette est vendue 1450F et Moto Revue, comme le kilo de pain, vaut 1 F.  Deux ans plus tard, c'est la fin, le Cyclotracteur est soldé à 245 F en avril 1924 et disparait définitivement.