Bugatti
17 cm3 Type 72 à compresseur - 1943
Un moteur miniature et quelques décennies d'avance
On ne pense guère à des deux roues à propos d'Ettore Bugatti. Le célébrissime ingénieur s'y est pourtant intéressé à plusieurs reprises. Avec un vélo pour commencer qu'il construisit artisanalement et sans but de commercialisation en 1913. Il se distinguait par la construction du triangle du cadre, du triangle arrière et de la fourche en doubles tubes fins superposés. On en connait trois exemplaires. Ettore Bugatti, qui a été le premier constructeur à équiper ses voitures de course d'un compresseur, a récidivé avec ses deux projets de "cyclomoteurs" tout à fait dans l'esprit de sa devise "Rien n'est trop beau, rien n'est trop cher". C'est sûr que les Ateliers de la Motobécane n'avaient pas de souci à se faire.
En attendant la fin des hostilités
Les Allemands ayant confisqué son usine, Ettore Bugatti, transfère toutes ses archives à Bordeaux et s'installe à Paris avec quelques dessinateurs. Il ne déposera pas moins de 66 brevets de 1941 à 1945. En 1943, il a le rare privilège de se voir attribuer 30 tonnes de fonte, 19 tonnes d'alliage léger et 3 tonnes de bronze en 1943. Une partie servira pour réaliser les T-69, T72 et T75 dans l'usine "La Fournaise" à Saint Denis qu'il vient de racheter.
Bien conscient du besoin de petits véhicules personnels dans l'après-guerre, Ettore Bugatti dessine alors le Type 69, un moteur de 50 cm3 qui se montait incliné le long du tube avant d'une bicyclette. L'alimentation était confiée à un compresseur et le "Patron" avait demandé à ce que son usine en produise 10000 exemplaires, mais son décès en 1947 mit fin à ce projet comme à celui du type 72.
Type 72 : un délire technologique en 17 cm3
Dans la même période 1943-44, il conçoit et réalise le minuscule moteur ici présenté, le type 72, un 17,2 cm3 qui tournait à 10 000 tr/min. Un délire ! Le cylindre est cette fois vertical et les deux soupapes sont commandées par un double ACT entrainé par engrenages et rappelées par des barres de torsion. D'un diamètre de 15,5 mm, ces mini soupapes ne pèsent que 13,4 gr. Les pistons avec axe et segments avouent 30 gr, et le vilebrequin, qui tourne sur deux roulements à billes, ne fait que 370 gr. L'alimentation est, comme sur le type 39, confiée à un compresseur de type Roots et de fabrication maison qui aspire son mélange via un carburateur Bugatti. Il faudra attendre
1966 et la Honda 125 cinq cylindres pour voir une miniaturisation similaire, encore que l'alésage de cette dernière était quand même bien plus grand : 35,5 mm.
Et aussi une vraie moto quatre cylindres de 370 cm3
Sans se limiter à ces cyclomoteurs d'exception, Ettore Bugatti fit aussi réaliser une moto de grosse cylindrée. Bien peu de renseignements à son sujet ont été divulgués, mais il semble qu'il ne s'agisse que d'une sorte de mulet, à la mécanique entièrement carénée, destiné à essayer dans le secret le petit moteur prévu pour la Type 68 B, une mini barquette deux places étudiée de 1942 à 1945, construite à un seul exemplaire, et présentée en 1946. Elle était équipée d'un petit quatre cylindres de 369 cm3 à huit soupapes, double ACT et compresseur, associé à une boîte à deux rapports, bref une mécanique qui se serait bien adaptée à une moto. On se demande d'ailleurs bien pourquoi Ettore Bugatti réalisa, pour l'essayer, une partie cycle de moto novatrice et fort sophistiquée, alors qu'aucune production n'était, dit-on, envisagée. Mystère.
Moteur monocylindre 4 temps refroidi par air - 17,2 cm3 (24 x 28 mm) - Puissance maxi à 10 000 tr/min - Pistons de 30 gr en duralumin - Double ACT et rappel des soupapes par barres de torsion - Carburateur Bugatti ø 16 mm - Compresseur Bugatti, diamètre des pales 52,5 mm, longueur 20 mm - Allumage par magnéto-France type LCO - Graissage par pompe à engrenages, 160 cl d'huile - monovitesse - Embrayage - Transmission par chaine au pédalier à deux couronnes accouplées et une seule chaine à la roue arrière.
Il manque ici les chaines sur cet exemplaire non restauré qui appartenait à Marc Nicolosi. Une chaine est entrainée par le pignon en avant du moteur passe au-dessus du pignon fou intermédiaire repositionnable pour régler la tension, et sur la couronne extérieure. Une seconde couronne fixée à la première reçoit la chaine de transmission moteur et vélo à la roue arrière.