Vincent HRD
1000 cm3 Black Lightning Dearden à compresseur - 1949
La plus folle des Vincent
En 1949, Vincent propose déjà à la vente les motos de série les plus rapides au monde avec son moteur 1000 cm3 bicylindre en V en version Rapide (45 chevaux et 177 km/h) et Black Shadow (55 chevaux et 200 km/h). La gamme vient de passer de la série B à la série C en troquant sa fourche à parallélogramme pour une fourche maison nommée Girdraulic. La marque ajoute au catalogue la Black Lightning, une 1000 compétition client développée sur la base de la monture utilisée par Rollie Free en septembre 1948 pour son record américain à 241,85 km/h sur le lac salé de Bonneville, rendu célèbre par son plat ventre en slip de bain.
Rêve de records contrariés
Quelques semaines plus tard, la revue The Motor Cycle offre un trophée et £500, bientôt augmenté à £1000, à qui battra, avec une moto entièrement britannique, le record de vitesse absolue détenu par BMW depuis 1937 avec une marque à 279,3 km/h. Ex-pilote devenu motociste, Reg Dearden demande à Vincent de lui préparer une Black Lightning. Cette Vincent très spéciale est prête fin 1949 puis retourne à l'usine en 1950 pour y recevoir un compresseur Shorrocks à palette sur un plan conçu par Philip Vincent en personne. C'est d'ailleurs la première fois que Vincent suralimente une de ses motos depuis la seule tentative malheureuse sur deux 500 monocylindres engagées au Tourist Trophy 1936. La base est identique à la Black Lightning de Rollie Free. Les modifications de partie cycle incluent un allongement de 15 cm pour pouvoir monter le compresseur derrière le moteur. Rien, hélas, ne se passe comme prévu. Alimentée en alcool par un seul carburateur SU de 63 mm, elle annonce pourtant 130 ch à 6800 tr/min. La tentative projetée sur une autoroute allemande est reportée après que NSU atteint 289,7 km/h le 12 avril 1951 en Allemagne. Dearden envisage alors d'emporter sa moto transformée en cigare de records aux États-Unis, mais l'avion qu'il a modifié spécialement pour ce transport est refusé à l'homologation. Le record est porté à 340,2 km/h par NSU en 1956 sur le lac salé de Bonneville. Le battre devient irréaliste d'autant plus que Graham, le champion du monde de GP 500 en 1949 prévu pour la tentative, s'est tué au TT de 1953. Abandon définitif, la Dearden ne courra jamais ! Sa préparation aurait coûté £3000 au total. Une Black Lighting est au tarif de 420£ au catalogue en 1949. Pour ce prix, de nombreux pilotes vont l'utiliser aux quatre coins du monde pour battre des records nationaux, remporter des courses de vitesse et d'accélération pendant encore de nombreuses années après l'arrêt de sa fabrication.
Moteur bicylindre en V à 50°, 4 temps refroidi par air- 998 cm3 (84 x 90 mm) - 130 ch à 6 800 tr/min - Soupapes commandées par arbres à cames surélevés et courtes tiges de culbuteurs - Allumage par magnéto Lucas KVFTT racing - 1 carburateur SU de 63,5 mm et compresseur Shorrocks à palette - Lubrification par carter sec, réservoir d'huile sous la selle - Boîte Vincent à 4 rapports boulonnée au carter moteur et sélecteur au pied - Transmission primaire par chaîne Triplex, secondaire par chaîne - Cadre poutre en tube de gros diamètre et moteur porteur - Suspensions av. Girdraulic, ar. oscillante type cantilever à simple amortisseur - Empattement 1620 mm - Pneus av.3,00 x 21", ar. 3,50 x 20" - 225 kg
La Vincent-Dearden n'a finalement jamais pu s'aligner dans la course aux records, mais elle est heureusement conservée aujourd'hui dans une grande collection dont elle sort parfois pour s'exposer. Elle est venue au Café Racer festival à Montlhéry en 2018 dans le cadre d'une exposition que j'eus le plaisir d'organiser en réunissant 17 motos de record... dont la Dearden était la seule à ne pas en avoir battu sur l'anneau..