Les V8 sont fort rares dans l’histoire du motocyclisme et plus encore ceux destinés à une utilisation routière. On connait dans les temps modernes la 800 Morbidelli V8 de 1998, mais, 40 ans plus tôt, était présentée au salon de Milan la Galbusera 500 V8 qui, se doublait même d’une 250 V4. Les difficultés financières jointes à de furieux bruits de bottes mirent fin au projet de l’ingénieur, pilote aventurier Adolfo Marama Toyo et de Plinio Galbusera. Ces étonnants V4 et V8 Galbusera apparurent pourtant une seconde fois au salon de l’année suivante, mais la conception interne du moteur resta, à l’époque totalement inconnue, si bien que des suppositions aussi erronées que fantaisistes furent émises par des journalistes techniques pourtant réputés. Chistian Christophe parla ainsi de deux doubles vilebrequins côte à côte et une évocation présentée en 2015 comme une réplique n’avait rien à voir ni en externe ni en interne, avec le V8 original. Tout ça jusqu’à ce que Franco Damiani di Vergada fasse de fort longues recherches sur la vie et les réalisations de Marama Toyo et en rapporte le résultat dans son livre « Sulle trace di Marama Toyo ». On y apprend qu’il inventa le speedway en Italie en tant que pilote comme de constructeur chez Galbusera, mais aussi tous les secrets des V4 et V8 Galbusera décrites en détail dans les fiches qui y sont consacrées.

Adolfo Marama-Toyo de son vrai nom Roberto Antonio Ivanicich, photographié ici en 1932 en arborant une superbe coupe de cheveux, est né le 1er juin 1898 à Fiume (aujourd’hui Rijeka, mais alors partie du royaume d’Italie). Il est enrôlé en mars 1916 dans l’armée Austro Hongroise, fait prisonnier en Russie, et réapparait deux ans plus tard, après de nombreuses péripéties, dans une unité militaire italienne installée dans la base de Tianjin en Chine. Il la quitte en mars 1920 et fait escale en Égypte où il reste 10 ans, en prenant même la nationalité locale. Engagé dans la marine marchande, il parcourt le monde et rentre à Fiume en 1931, où il organise et remporte cette même année la première course de speedway en Italie.
Plinio Galbusera est né à Varèse le 13 janvier 1907. Pilote de course de vitesse, il se passionne pour le speedway au début des années 30 lors de l’introduction de ce sport en Italie par Marama Toyo. Il devient fabricant de motos en 1934 et propose des motos de route de 175 à 500 cm3 équipées de moteurs Rudge Python, ainsi que la première moto italienne de piste ovale avec, là encore, un 250 Rudge. La marque propose à partir de 1936 des motos de tourisme à moteurs MM modifiés avant d’arriver à la présentation des fameux prototypes de 250 V4 et 500 V8 en 1938. Ci-contre le pilote Menetti et sa Galbusera en juillet 1934 et, au-dessus, Plinio Galbusera en compétition dans les années 50.

La Galbusera 250 V4 dans sa première mouture prototype du salon 1938. Cliquez sur la photo pour accéder à la fiche descriptive complète.
Au salon de Milan de 1938, la révolutionnaire et si originale Galbusera 500 V8, fut quasiment oubliée par Motociclismo, la revue moto de référence en Italie, ce qui explique aussi le peu de renseignements sur cette machine à l’époque. Le croquis en dessous de la moto montre bien l’assemblage des deux vilebrequins (identiques à ceux de la 250 V4) qui tournent en sens inverse avec une prise de force et l’embrayage au centre. Il y a deux bielles sur chaque maneton et non une seule avec une bielle secondaire comme il a été écrit. Pour une description complète et détaillée, se reporter à la fiche du modèle en cliquant sur la photo.
Ci-dessous, le stand Galbusera à l’exposition internationale du cycle et de la moto à Milan du 19 au 31 janvier 1939. Au premier plan, une 350 équipée d’un moteur MM à soupapes latérales. Derrière, une 250 V4 en version tourisme, la 500 V8 en version tourisme et tout en haut, une 250 V4 en version course, toutes les trois sont maintenant équipées d’une suspension arrière coulissante.

La réplique réalisée en 2014 et présentée en 2015 dans Motociclismo, soi-disant sur la base d’un exemplaire retrouvé en Yougoslavie, n’est qu’un pastiche très lointain de l’original. Le moteur n’a rien à voir, ni dans son apparence avec des ailettes très carrées ni dans ses cotes internes. Dommage qu’il ait été présenté à l’époque comme une réplique et non une évocation.

L’atelier de Galbusera est totalement détruit par les bombardements en 1945. Plinio Galbusera repart de zéro après guerre en ouvrant un garage qui reprend la fabrication en petite série de tricycles utilitaires et de 125 et 200 cm3 à moteurs Villiers. La compétition le tenaille toujours et il propose en 1949 cette 250 de speedway à moteur NSU.
Marama Toyo sur une 500 Rudge Python lors de sa dernière course à Montebello à côté de Trieste le 30 mai 1946, à presque que 48 ans. Point d’orgue de la journée, la catégorie dirt track 500 où Marama Toyo termine deuxième. C’est après la ligne qu’il perd le contrôle à vive allure et heurte les colonnes de béton de la clôture délimitant la piste. Il meurt en soirée à l’hôpital, emportant avec lui les secrets des prototypes qui n’ont à ce jour pas été retrouvés.
La disparition de Marama Toyo n’empêche pas la production de l’usine Galbusera de se diversifier rapidement avec des motos de tourisme en 250, 350 et 500 quatre temps, des petites cylindrées à moteur Sachs ainsi que cette superbe 500 de speedway de 1954-1955 à moteur NSU à ACT. La production de motos est définitivement arrêtée en 1955.
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Vraiment ingénieux , quel dommage qu’il n’en reste pas une à remettre en route