Jacky Boeuf

Jacky Boeuf est décédé aujourd’hui, le 30 octobre 2024 à 94 ans.

Jacky Boeuf, coureur amateur dans les années cinquante, spécialiste en électricité automobile et éternel associé de Jean Nougier à Saint-Andiol.

Jacky Boeuf, vous n’avez peut-être pas eu la chance de le connaître, mais vous avez peut-être lu ses souvenirs sans le savoir. Il avait en effet une mémoire fabuleuse et d’une précision déconcertante et c’est lui qui m’avait raconté tout ce que j’ai écrit dans mon livre sur les motos Nougier. J’avais d’ailleurs retranscrit ses paroles enregistrées dans un chapitre pour conserver son language si fleuri d’un bel accent de Provence.

Des histoires et des souvenirs, Jacky, fort bavard, en racontait à longueur de temps et nous l'écoutions avec passion.

Incroyable Jacky qui se rappelait de chaque course, tour par tour : « cette fois où untel a cassé au 17e tour, et Henri l’a passé » ou cette anecdote qu’il racontait : « tu sais, on avait pas beaucoup d’argent à cette époque et des fois Jean engageait ses motos dans deux courses locales le même jour. Comme ça on avait couru le matin à … et la moto avait cassé une soupape, mais elle était engagée l’après-midi dans une autre petite ville. Jean m’a dit tu vas conduire et je monte derrière avec la moto. Il a démonté et réparé la distribution pendant le voyage et on a gagné la course l’après-midi ! »

Ces dernières années, Jacky avait progressivement perdu presque complètement la vue, mais Claude Caucal, son meilleur ami, venait le chercher pour l’amener à son atelier et Jacky, même quand il ne pouvait plus le faire lui-même, le guidait pour régler un allumage ou réparer une magnéto.

Ultime petit réglage par Jacky Boeuf de la Terrot 500 RCP de 1935 que va piloter Claude Caucal.
Jacky Onda et Jacky Boeuf, les premier et dernier pilotes de cette ultime 175 double arbre.
Avec André Nougier (le fils de Jean) pour un tour d'honneur sur le circuit de Dijon en 2008.

Une page de l’histoire se tourne et nous avons perdu un ami. A sa famille, sa fille Babette, ses trois fils, Philippe, Christophe et Jean-Pierre, et ses proches, je présente toutes mes condoléances.

Adieu, l'ami, tu vas nous manquer.

Jacky Boeuf, coureur amateur dans les années cinquante, puis spécialiste en électricité automobile et éternel associé de Jean Nougier à Saint-Andiol nous a quittés.

Jacques Onda 1935-2022

Jacques Onda avec la Nougier 175 de 1959 devant les ateliers de Jean Nougier en 2013

Il est toujours difficile de rendre hommage à un ami disparu et c’est malheureusement aujourd’hui le cas avec la disparition de Jacques Onda, deuxième du nom, le 6 mars dernier à l’âge de 86 ans.

Cette famille niçoise de motocistes et champions motocyclistes, tous prénommés pareils et tous champions de France de vitesse, a marqué l’histoire de la moto en France et continue de le faire avec la concession Yamaha, dont s’occupe toujours à la même adresse, 15 rue Trachel, Jacques Onda, troisième du nom.

Photos d’archives des familles Onda et Nougier

Souvenirs de course. De D à G: Jacques Onda, Claude Caucal, Jacky Boeuf et André Nougier.
Le magasin de la rue Trachel à Nice en 1950. Jacques Onda est à droite, assis sur une moto.

Bien que parisien, j’ai toujours eu une relation privilégiée avec la famille Onda. Journaliste dans les années 70-80, j’y passais souvent au cours de mes essais, puis, travaillant pour le Product Planning de Yamaha Motor Europe, je profitais de leur parfaite connaissance du marché pour venir fréquemment les questionner et leur demander leur avis sur de nouveaux projets en cours, voire pour essayer des prototypes avec eux dans l’arrière-pays niçois. Quelques projets qui n’auraient sans doute pas vu le jour sans leurs commentaires enthousiastes et avisés qui influencèrent grandement nos décisions. J’eus ainsi la chance de voir les trois Jacques Onda ensemble avec leurs familles et la disparition de Jacques deuxième du nom m’attriste profondément. FMD

GP de la Libération de la ville de Nice en 1945. de G à D : Henri Nougier 1er en 250, Jean Nougier, Jacques Onda, 1er en 500, Marcel Maniforti mécano, Jean Berha (n°5) 1er en 350, beau frère de J. Onda.

Né en 1935, Jacky Onda reprend la passion de son père né en 1902 et s’occupe avec lui du magasin de la rue Trachel à Nice que son papa a ouvert en 1927 sous les couleurs de Magnat-Debon. Qui mieux que lui-même peut raconter l’histoire de sa très brillante carrière sportive ? Je retranscris donc ici la longue interview qu’il m’avait accordée à l’occasion de la sortie de mon livre sur les Nougier,

Jacky Onda sur la Nougier 125 double arbre au GP de Cannes en 1952

« Jean Nougier était pour moi comme un deuxième père » commence Jacky Onda avec une émotion à peine contenue. « Je suis né le 21 avril 1935 et après quelques essais dans les courses de côte locales, j’ai fait ma première course au GP de Nice, le 1er mai 1951. Comme je n’avais pas encore 16 ans, j’ai couru avec la licence de mon père (NDA : un avantage de la famille qui compte trois Jacques ou Jacky Onda sur trois générations. Jean Nougier m’avait prêté sa 125 à double ACT tandis que Jean Behra et Henri Schaad étaient engagés avec ses 175 double arbre qui couraient dans la même catégorie, les 125 venant d’être interdites. Ils ont cassé et j’ai terminé 2e derrière la Morini de Gaston Gaury (une moto très spéciale avec un moteur Morini simple ACT monté dans la partie-cycle de la deux-temps). Il y en a qui ont voulu déposer une réclamation, mais je leur ai laissé la prime et ça s’est arrangé comme cela. À la course suivante, j’avais ma licence ! »

Dès ses débuts, Jacky Onda note soigneusement ses résultats et ses réglages.
Sans licence au GP de Nice en 1951, il termine 2e avec sa 125 Nougier derrière la Morini de Gaston Gaury.
Podium aux Coupes du salon à Montlhéry en 1952 avec la 125 Mondial. On reconnait Georges Houel aux côtés de Jacky Onda, en combinaison blanche.

« En septembre 1952 à Avignon j’ai gagné en catégorie 175 avec la 125 Nougier double-arbre devant un Italien, Joseph Errico, qui courait sur une 125 Mondial simple-arbre. “Je te la vends la Mondial”, qu’il me dit à l’arrivée. Je lui ai acheté et j’ai remporté à son guidon les Coupes du Salon à Montlhéry en octobre devant Collot et Pahin, mais pour la saison suivante j’ai signé un contrat d’exclusivité avec Magnat-Debon et Nougier et j’ai laissé la Mondial pendant deux ans en Italie. Quand je courais pour Magnat-Debon, c’est eux qui me versaient les primes et Nougier me prêtait les machines. »

Aux Coupes du salon en 1953 sur la Mondial simple ACT.Sa mère est à son bras et son frère Henri (décédé en course de côte) est derrière le bouquet aux côtés d'Eugène Mauve en casquette.
1er avec la Nougier 175 double ACT à Orléans en 1954 devant la MV Agusta de Georges Burgraf et la Peugeot d'André Boin.

« En 1954-55, j’ai couru sur les Nougier sous les couleurs de Magnat-Debon avec une exception pour le Grand Prix de Cannes fin mai 1955. En 175 j’étais sur la Nougier et j’ai fini premier, mais en 125 j’avais la Mondial et, comme j’étais sous contrat avec Magnat-Debon, je me suis engagé sous le pseudo de Dahon, mon nom inversé et j’ai aussi fini premier. Entre-temps j’ai aussi fait quelques courses en Italie en 1956 à Ospedaletti, le circuit de San Remo, mais là-bas j’étais avec la Mondial officielle que me prêtait l’usine. »

Une belle victoire au GP de Bourges en 1953 avec la 250 double arbre construite par Jean Nougier pour Terrot/Magnat-Debon.
Aux 2 Heures éliminatoires du Bol d'Or en 1954 avec la 175 Nougier dont on note la roue arrière crevée dans le dernier tour. De D à G Jean Nougier et son épouse, Jacky Onda,et madame et monsieur Maisonneuve pilote de rallye sur Magnat-Debon.

En 1954, deux heures après que j’ai gagné mon titre de Champion de France sur sa moto, Jean Nougier me dit : “Va donc prendre ta 175 Mondial pour Avignon”. Mon père a été la rechercher en Italie et j’ai gagné le GP d’Avignon le 5 septembre 1954 devant la 175 Nougier pilotée par Schaad.

La Nougier 175 était au niveau des meilleures compétition-client italiennes, en particulier des Mondial, mais quand même un petit ton en-dessous des machines d’usines et en 1956 je suis passé sur la Mondial double arbre officielle.

Victoire au GP d'Avignon et champion de France 1954 sur la 175 Mondial. Schaad est 2e sur la Nougier.

« En 1956, j’ai donc couru sur les Mondial officielles puis toutes les grandes usines italiennes se sont retirées officiellement de la compétition et je suis passé naturellement sur les Paton qui avaient repris le service course Mondial. »

 

1er sur la Mondial 175 aux 2 Heures de Paris en 1955
Livraison de la Mondial devant le magasin de la rue Trachel. Jacky qui fait son service est en uniforme.
Une hair d'honneur en Magnat-Debon 175 Rallye pour le mariage de Jacques et Monique.

« J’étais bien sûr resté en contact avec Jean Nougier qui m’a rappelé à la rescousse en 1963, car il n’avait pas de pilote pour piloter son 50 double arbre à Bourg-en-Bresse puis à Clermont-Ferrand, puis encore à Bourg en mai 1964 dans sa version 6 vitesses cette fois. Je n’avais vraiment pas le gabarit pour et quand même 28 ans. J’ai eu un accident en 1963 alors que j’étais en tête du Championnat de France et c’est Pierre Viura qui a pris le relais.

J’ai fait ma dernière course en 1965 sur le Mondial 125 deux temps à distributeur rotatif avec lequel j’ai été champion de France devant Viura sur Honda. »

Jacky Onda sur le 50 Nougier double arbre en 1964 au GP de France. Il n'avait pas vraiment le gabarit !
Sur le Mondial 175 en 1964.

Après l’accident mortel de son frère Henri à la course du Mont-Chauve en juillet 1965, là où justement il avait effectué sa première course, Jacky Onda raccroche définitivement son cuir en 1966. Il a alors 31 ans!

Il se consacre dès lors avec son épouse Monique, qui s’occupe de la comptabilité, à son magasin Magnat-Debon créé par le premier Jacques Onda en 1927. En 1963, il est l’un des premiers à représenter les Yamaha en France et il en devient l’un des plus grands concessionnaires exclusifs en 1974. Le relai sera pris par Jacky Onda, troisième du nom et lui aussi champion de France sur Yamaha TZ 250 en 1983.

Retraité heureux, Jacques Onda, le deuxième, avait gardé son amour de la moto sportive et sillonnait régulièrement jusqu’il y a peu l’arrière-pays nicois au guidon des dernières sportives Yamaha. On le voyait aussi bien souvent au magasin, bien fier de la façon dont son fils tenait les rênes et perpétuait la tradition familiale. Il s’en est allé le dimanche 6 mars, mais nous ne l’oublierons pas.

Jacques Onda avec la Nougier 175 de 1959 devant les ateliers de Jean Nougier en 2013 Il est toujours difficile de rendre hommage à un ami disparu et c'est malheureusement aujourd'hui le cas avec la disparition de Jacques Onda, deuxième du nom, le 6 mars dernier à l'âge de 86 ans. Cette famille niçoise de motocistes [...]

Pierre Viura : Champion de France 1967-70-71

Pierre Viura nous a quittés en cette fin octobre 2019 et je tiens à lui rendre un dernier hommage en republiant ici le long interview qu’il m’avait accordé pour mon livre sur les frères Nougier et leurs motos.

Pierre Viura est vice-champion de France Inter en 1965 sur sa Honda, puis trois fois champion de France Inter en 1967, 70 et 71, la première fois sur Honda 125 CR93 puis sur la 125 Maico RS d’usine préparée par Jean Nougier. Les relations entre “les Viura” et “les Nougier” sont d’ailleurs une longue histoire de famille. Jean Viura, le père de Pierre, était déjà l’adversaire éternel d’Henri Nougier au début des années trente, mais sur la piste seulement, car les deux hommes étaient amis dans la vie.

Pierre Viura au GP de France à Clermont-Ferrand en 1964 où il finit 9e en inter et 3e Français sur le 50 Nougier double ACT à 6vitesses.

Pierre Viura raconte

 « Je suis né en 1931 et j’ai fait ma première course en 1951 sur un 100 Monet-Goyon à moteur Villiers alors chronométré à 103 km/h. Au début je montais un peu ce qu’on me prêtait, n’importe quoi. En tout, j’ai piloté 19 marques de motos… Je suis arrivé chez Nougier en 1964. Je venais juste d’acheter le 125 Honda CR 93 . “Tu as acheté le Honda ? ”, me dit Jean Nougier ,“Tu peux pas me l’amener ?”. Une heure après, il était tout démonté ! Comme Jacky Onda ne voulait plus piloter le 50 double arbre, j’ai fait les essais avec ce 50 Nougier. J’avais de fait un gabarit plus adapté au 50 que le sien avec mon 1 m 60 et, à l’époque, 55 kg ».

 

« Je n’avais jamais piloté un 50. Aux essais, je les voyais tous en dérapage… Où tu es ! C’est quoi cette galère !… Il faut tout prendre en dérapage avec le 50 pour que passent les chevaux pour pouvoir sortir du virage. Ça a été ma première course en 50. Il marchait vraiment très, très bien, mais il lui manquait quand même un peu de chevaux et environ 10 km/h. Nous l’avons chronométré à 122 km/h à Aureille, ce n’était pas assez face au Derbi qui faisait au moins 140. À Avignon on était tous derrière ! Nougier est ensuite passé au deux-temps et j’ai piloté le Nougier-Guazzoni en 1967 puis, en 1969, la version à cylindres Maico qui allait vraiment fort bien qu’un peu fragile. À Pau j’avais cassé aux essais. On a changé le piston en 10 minutes, on a enlevé l’essence et retourné le moteur pour enlever la limaille et l’après-midi j’ai fait second ! »

Pierre Viura en 2013 devant le 50 Nougier en cours de reconstruction dans l'atelier de Jean Nougier à Saint-Andiol.
Le 50 Nougier dans sa première mouture de 1961. Le 50 double arbre est monté provisoirement dans un cadre de Peripoli, avec un réservoir vraiment "pas beau". Les carters moteurs sont ceux de la 125 Terrot.
Seconde mouture du 50 Nougier double ACT le 3 mai 1964 dans le parc de Bourg en Bresse où Jacky Onda Onda finit 3e à 1 tour derrière les Derbi de Roca et de Cassegrain.
Pierre Viura sur le 50 Nougier au GP de France en 1965.
Pierre Viura à Lyon en juin 1964 où il finit 5e.
A Bourg-en-Bresse en 1969 où Pierre Viura finit 4e avec le Nougier-Guazzoni à cylindre Maico échappement vers l'avant et boîte six. On voit derrière la Maico 120 RS de Viura qui cache la 125 Maico-Nougier de Crivello.

« En 125 c’étaient mes motos à moi. Le Honda CR 93 puis des Maico avec qui j’étais sous contrat. J’avais les versions d’usine à refroidissement liquide… enfin peut-être pas les mêmes que celles que l’usine confiait à ses pilotes allemands et qu’on m’a prêtée à une occasion. N’empêche qu’aux Coupes de Paris à Montlhéry en 1969, Daniel Crivello sur sa Maico privée préparée par Jean Nougier me doublait dans le bout droit et à la ferme je suis passé dans l’herbe pour le sauter ! Jean Auréal a remporté la course sur sa Yamaha, Daniel  Crivello a terminé second et moi troisième.

La Maico usine de Pierre Viura (n°5) et la: Maico Nougier de Daniel Crivello (n°12).
Essais sur l'autoroute en construction vers Cabanes du 125 Maico RS d'usine avec le personnel de l'usine, Jean Porte, M. Correau Pt de du MC d'Arles, Hubert Soulignac, Jean Nougier et Marius Soulignac (en casquette), les deux patrons de l'usine et Pierre Viura. Soulignac s'occupe du motocross et Nougier de la vitesse. Photo J. Bœuf

« J’ai aussi couru pour Nougier en 250 sur la double arbre bicylindre et sur le bicylindre deux temps à Clermont et à Cannes, deux ou trois fois… En 1962, comme Jean Nougier parlait d’arrêter la compétition, j’ai d’ailleurs envisagé de lui acheter soit sa 250 bicylindre double arbre soit l’ultime évolution de la 175 bloc moteur portée à 250 cm3 que j’avais essayée, mais j’ai été alors engagé sous les couleurs officielles de Maico et j’ai abandonné cette idée ».

Le Honda CR 93, ici photographié à l'Iwashita collection hall au Japon.

« C’était un plaisir de travailler avec Jean et je n’ai jamais eu à me plaindre. Jamais une remarque, rien, il écoutait superbement tout ce que je disais et il faisait en fonction. Il n’y a en fait qu’avec la 250 bicylindre que nous avons eu des problèmes. Mickey Schaad l’a pilotée et il disait la même chose que moi, elle se déréglait régulièrement sans qu’on trouve ce qui n’allait pas. Ça venait de l’allumage. Pour l’anecdote, c’est aussi à Jean que je dois les couleurs que j’ai toujours portées en course sur mes carénages et sur mon casque, le “bleu Delphinium” une teinte piochée dans l’échantillonnage des DS Citroën, bien sûr. On était tellement habitué à me voir avec ces couleurs qu’on m’appelait Delphinium ! »

Le 28 mai 1972 à Bourg-en-Bresse, Pierre Viura sur la 250 Nougier deux-temps, qui effectue sa première sortie, termine 9e derrière Pfirter (Yamaha), Roca (MZ), Appietto, Chevalllier et Marsowsky (Yamaha), Rougerie (Aermacchi) et Pini (Yamaha) et devant Bourgeois. « Ça a été ma dernière course sur Nougier, après c’est André Kaci qui a repris la 250, mais j’avais gardé la machine un certain temps et un ami me propose un jour de m’acheter le frein pour sa BMW. Je demande à Jean : “Pourquoi pas” me dit-il, mais il était quand même plutôt fâché ou surtout vexé que je ne veuille plus courir. C’est comme ça que la 250 s’est finalement retrouvée avec un frein avant à disque de Honda. »

« Cette année-là j’ai encore été champion de France en 125 avec la Maico, mais ils ont ensuite arrêté mon contrat et j’en avais marre. J’ai donc arrêté la compétition en 1973 à 43 ans. Il faut dire qu’en dehors des courses je ramassais les photos et le hors-sac pour le Provençal. Avignon, Arles, Marseille, etc… Je faisais jusqu’à 17 000 km en moto certains mois (en m’arrêtant quand même à chaque passage au garage Nougier !) et ça depuis des années. Les jours de fête, Noël, je travaillais tout le temps et le vendredi il fallait charger tout seul les motos… Heureusement, Jacky Bœuf me remplaçait de temps en temps quand j’allais courir ».

« J’avais commencé mes tournées avec une Triumph T110, la “pisseuse d’huile”, puis ça a été une 650 Matchless avec un carénage Avon qui a tenu 100 000 km. Après je suis allé chez BMW, mais en général au bout de 25 000 elles étaient cuites encore qu’avec une d’elles j’ai fait 530 000 km, juste en refaisant l’embiellage à 360 000, et elle tourne toujours !

Pendant toute ma carrière sur deux roues j’ai eu quelques accidents et 27 fractures en tout dont deux en jouant au ballon. Le reste c’est la moto, mais jamais en course où je ne suis ne suis tombé que 5 ou 6 fois, pas plus. Une fois au Mans à 150 km/h, mais le lendemain je courrais, et puis à Montlhéry, à Cannes avec la 250 et au Ventoux où on m’avait prêté une moto où le bouchon d’huile n’était pas serré. Tout est parti sur le pneu avant au freinage ! À mon dernier accident sur route en 1992 et à cinq minutes de chez moi, j’ai eu 17 factures, dont 14 aux côtes et 17 jours de coma… ça ne m’empêche pas de continuer à faire de la moto tous les jours »… me dit-il, en enfourchant sa 1000 Yamaha !

(Interview par François-Marie Dumas recueillie en 2013 à Saint Andiol).

La Nougier 250 bicylindre assez brièvement pilotée par Pierre Viura.
Jean Nougier donne ses derniers conseils à Pierre Viura au guidon de la 250 Maico en 1972.
La Nougier 240 bicylindre pilotée par Viura à Bourg-en-Bresse en mai 1972
Démarrage à la poussette de la 500 Nougier double ACT de 1937 lors de notre dernier rencontre en 2013. Claude Caucal est au guidon, André Nougier et Pierre Viura poussent.
Pierre Viura nous a quittés en cette fin octobre 2019 et je tiens à lui rendre un dernier hommage en republiant ici le long interview qu’il m’avait accordé pour mon livre sur les frères Nougier et leurs motos. Pierre Viura est vice-champion de France Inter en 1965 sur sa Honda, puis trois fois champion de France [...]

Une nouvelle Nougier !

L’écurie Nougier continue et les infatigables restaurateurs des samedis, André Nougier, Jacky Bœuf et Claude Caucal viennent de terminer la dix-huitième moto Nougier, en l’occurrence la 175 double arbre de 1952 dite, la grand-mère, avec cette année-là un moteur tout alu, un nouveau cadre double berceau plus léger, et une boîte à cinq rapports. La voilà […]