Ultima 500 : un twin 4 temps horizontal en 1951

Rien d’impossible à Fernand Fargeton, responsable du bureau d’études de la marque lyonnaise Ultima. Puisque son ami et pilote Aimé Despland veut le meilleur side-car du moment, le plus facile est de tout faire soi-même. Ainsi naît cette unique et fantastique Ultima, l’un des premiers twins quatre temps horizontaux de l’histoire et la première 500 de compétition française de l’après-guerre.
Photos & archives François-Marie Dumas/moto-collection.org sauf mention contraire

L’Arsenal

Dans l’immédiat après-guerre, Fernand Fargeton, fils d’un des pionniers d’Ultima, réalise une 350 et une 500 monocylindre à simple ACT puis une quatre-cylindres constituée de quatre monos deux temps accouplés en carré. En 1948, il décide avec le sidecariste lyonnais Aimé Despland, qui finance le projet, de construire de A à Z un attelage de 600 cm3. Eugène Billion, le directeur, n’associe pas officiellement sa marque, en difficultés financières… mais il permet que le travail soit réalisé dans ses ateliers en dehors des heures de travail. Après avoir pensé à accoupler deux monocylindres de Velocette KTT, les deux compères décident finalement de réaliser eux-mêmes le moteur. Ce sera « l’Arsenal », un 600 cm3 bicylindre quatre temps parallèle et horizontal avec une distribution à deux ACT entraînés par deux arbres et couples coniques comme sur les 350/500 NSU de 1938 à 53 à compresseur.

L'Ultima est présentée aux Coupes du Salon le 7 octobre 1951 à Montlhéry. C'est la première nouvelle 500 cm3 de course française de l'après-guerre. Les lunettes noires dissimulent Fernand Fargeton et Aimé Despland est à sa droite. Notez la suspension arrière oscillante dotée d'amortisseurs oléo pneumatiques avec une valve de gonflage. Ils seront abandonnés l'année suivante.
La version 1952 se dote d'un carénage englobant le guidon et perd sa suspension arrirère.

Un des premiers bicylindres quatre temps horizontal

Une mécanique somptueuse, mais, surtout, un concept d’avant-garde qui ne sera un succès commercial qu’un demi-siècle plus tard. Il s’agit en effet d’un des premiers bicylindres quatre-temps horizontaux de l’histoire. Exception faite pour la prestigieuse Hildebrand & Wolfmüller de 1894, quand même bien spéciale avec sa roue arrière qui sert de vilebrequin, cette disposition n’apparaît qu’avec lAJS 500 Porcupine présentée 1947. L’Ultima 500 fait son entrée sur les circuits en 1951, le concept du twin horizontal est repris en 1969 avec la Linto 500 basée sur l’accouplement de deux Aermacchi 250 cm3 culbutées et, tenez-vous bien, il faut attendre l’apparition de la Yamaha 500 T-Max en 2000 pour voir cette disposition de moteur quatre-temps en grande série !

La raison de cette désaffection est simple : sa taille. L’addition d’une boîte de vitesses et de la volumineuse culasse d’un quatre-temps rallonge déraisonnablement l’empattement. Ce problème, résolu sur le T-Max par la compacité d’un moteur moderne et les petites roues d’un scooter, était sans importance pour l’Ultima exclusivement destinée au side-car où l’empattement long est plutôt un avantage et la faible hauteur un impératif.

Les arbres à cames d'admission et d'échappement sont entraînés par des arbres et couples coniques séparés comme sur la NSU 500 de Grand Prix en 1950. C'est beau, mais c'est sans doute la solution la plus onéreuse et celle qui induit les perte de puissance due aux frictions les plus fortes.
Cette 500 NSU bicylindre à compresseur utilisée de 1938 à 53 a certainement inspiré Fernand Fargeton.
L'inconvénient des bicylindres quatre temps horizontaux est leur longueur a fortiori avec, comme ici, une boîte de vitesses séparée.
Aimé Despland, très fier du moteur que lui a concocté Fernand Fargeton qui ne pèse que 55kg (sans sa boîte de vitesses). La moto complète n'avoue d'ailleurs que 165 kg. (archives Jean-Marc Brionnet)

Pas de chance

Pas de chance, le superbe 600 cm3 conçu par Fargeton et Despland est à peine construit qu’une nouvelle réglementation side-car interdit les compresseurs et limite la cylindrée à 500 cm3. C’est donc dans cette cylindrée qu’apparaît l’attelage aux Coupes du Salon à Montlhéry en octobre 1951. Le moteur qui paraît monumental ne pèse pourtant que 55 kg avec ses deux carburateurs et sa magnéto, mais, il est vrai, sans transmission primaire, ni boîte. Ses côtes super carrées de 70 x 64,5 mm lui permettent d’atteindre sa puissance maximale de 48 chevaux au régime, fort élevée pour l’époque, de 8 200 tr/min. Malheureusement, les huiles d’alors sont encore un gros point noir et, en dépit du surdimensionnement de sa pompe à huile que l’on voit sous les deux arbres d’entraînement d’ACT, la belle Ultima abandonne dans sa première course sur ennui de lubrification.

Grâce au moteur horizontal, le cadre est très bas, mais ce double berceau torturé et constitué d’éléments boulonnés démontables ne brille pas par sa rigidité dans sa première version dotée d’une suspension arrière oscillante à deux amortisseurs oléo pneumatiques. Aux grands maux, les grands remèdes : la version 1952, toujours à double berceau démontable, abandonne toute suspension arrière et en profite pour augmenter la contenance du réservoir d’huile.

Il ne suffit pas hélas d’une bonne idée, les moyens manquent pour faire évoluer « l’Arsenal » et les grandes marques reviennent en force avant qu’elle n’ait eu le temps de s’affirmer. Elle sera cédée au coureur régional Roger Besse et abandonnera bientôt les circuits.

Pas de suspension arrière sur la moto ni sur la roue du side-car Impérial.
Fargeton s'est sans aucun doute inspiré de l'Italie où le carénage avant prolongeant le réservoir et englobant le guidon était alors très à la mode.
Ce joli petit tambour du double frein simple came devait quand même être un peu léger !
Aimé Despland et un mécano présentent le moteur en 1951.(archives Jean-Marc Brionnet)

Fiche technique

Bicylindre 4 temps horizontal – 496 cm3 (70 x 64,5 mm) – 2 ACT entraînés par arbres et couples coniques – 48 ch/ 8 200 tr/min – Graissage à carter sec – Boîte de vitesses séparée à 4 rapports – Transmissions primaire et secondaire par chaînes – Cadre double berceau tubulaire démontable – Suspensions oléopneumatiques : avant télescopique, arrière oscillante à 2 amortisseurs en 1951, cadre rigide en 1952 – Double frein simple came à l’avant – Poids : 165 kg – Moteur seul  avec ses carburateurs et sa magnéto: 55 kg –  Vitesse avec side 150 km/h.

Le sidecariste Aimé Despland eut une assez brillante carrière. On le voit ici au guidon d'une Jonghi 350 TJ4 attelée d'un side-car Impérial avec laquelle il vient de finir second en catégorie side 350 derrière la Sunbeam de Robert Kiéné au Bol d'Or 1936. Comme d'usage c'est Eugêne Mauve qui pose entre Despland et son "singe" Lhéritier.(archives Jean-Marc Brionnet)

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3 commentaires sur “Ultima 500 : un twin 4 temps horizontal en 1951

  1. YLM dit :

    Chapeau bas à Mr Fargeton qui est en quelque sorte l’inventeur de la 500 Gamma, si quelqu’un possède des photos du moteur de cette machine je suis intéressé.

  2. Sylvain dit :

    Bonjour François Marie,

    En lien avec votre très intéressant article sur la 500 Ultima Arsenal construite par Fargeton pour Desplan voici 2 photos l’une de la moto prise sur le vélodrome du Parc de la Tête d’or à Lyon et l’autre du moteur.

    Merci pour vos articles toujours très intéressants et documentés
    Cordialement, SP

  3. gigi dit :

    Le frein avant n’est pas si petit….et c’est un double frein , à deux pistes de freinage ….