Les 100 ans de Monet Goyon à Epoqu’Auto

Beaucoup de motos cette année encore au salon Epoqu’auto à Lyon avec en vedette le stand Monet Goyon-Koehler Escoffier sous l’égide de Thierry Roussel qui n’exposait pas moins de quarante cinq modèles de la marque pour fêter son centenaire. Visite commentée :

Il y a tout juste cent ans, en 1916, et en pleine guerre mondiale, Joseph Monet et Adrien Goyon s’associaient pour fabriquer des véhicules destinés aux mutilés de la guerre. La société Monet-Goyon voit le jour en avril 1917 à Mâcon et ses premières productions utilitaires se doublent bientôt de motos légères sportives animées par des moteurs Villiers deux temps avec lesquels la marque est championne de France de 1924 à 1927.  Les premiers quatre temps apparaissent dans la gamme au milieu des années 20 avec des moteurs suisses MAG et Monet Goyon prend une nouvelle dimension en rachetant en mars 1929 la marque Koehler Escoffier connue pour ses monos et bicylindres à arbre à cames en tête réalisés par l’ingénieur Raymond Guiguet. Monet Goyon sera ensuite l’une des marques les plus dynamiques et créatives de l’après-guerre, mais la quasi-disparition de la moto en France à la fin des années cinquante verra aussi celle de Monet Goyon qui arrête définitivement sa production en 1959. Elle revit aujourd’hui avec le musée de Michel Gagnaire à Melle dans les deux Sèvres et le très dynamique club MCMGKE à qui nous devons cette remarquable exposition. http://www.monet-goyon.com

Photos F-M Dumas/moto-collection.org – Les liens en bleus renvoient aux fiches des motos concernées, au club et au musée Monet Goyon

Monet Goyon Voiturette 750 cm3 bicylindre en V – 1919 à 1922

Ce curieux véhicule surnommé ‘Tête de bourrique’ était proposé en version tourisme ou utilitaire, équipé de moteurs MAG suisses ou Anzani (France). Construit à peu d’exemplaires, il représente la première incursion dans le monde automobile de Monet Goyon qui produit ensuite ses Cyclecarettes.

V2 torpédo 1922, Châssis tubulaire, deux places, deux vitesses, freins aux roues arrière et à patins sur le volant moteur. Collection Michel Gagnaire, Musée Monet Goyon

Monet Goyon : Moto Légère 119 cm3- 1921 à 1923

Cette première moto conçue et construite dans les ateliers Monet Goyon est équipée d’un moteur sous licence ‘Wall Auto Weel’ fabriqué à Mâcon, à soupape d’admission automatique. Cette machine est dépourvue d’embrayage et de boîte de vitesses. Démarrage en pédalant et moteur coupé à chaque arrêt de la machine. Frein avant à patins et un autre patin sur le volant moteur. Parfaitement restauré ce modèle pour dame et ecclésiastique de 1922 est une rareté. Collection Michel Gagnaire, Musée Monet Goyon

Monet Goyon Cyclecarette 250 cm3 – 1922 à 1923

Après le Super-Vélauto de 1921, la marque construit sur cette base les Cyclecarettes VTl , VT2 puis V 3, dont l’arrière reste celui du scooter tandis que l’avant est remplacé par un train type automobile, à roues directrices, actionnées par un volant. D’abord équipée du moteur Villiers 270 cm3 deux temps, la Cyclecarette utilise ensuite le nouveau 250 cm3, toujours Villiers, mais un peu plus performant avec 2 vitesses par chaÎnes et double pignon. Elle atteint alors 50 km/h. Le modèle de 1922 présenté a deux places face à la route. Collection Michel Gagnaire, musée Monet Goyon

Monet Goyon 147 cm3 type Z – 1923 à 1928

Ce modèle Z, ici dans sa version ‘Tourisme’ de 1923, connut un beau succès. Equipé du nouveau moteur Villiers, fiable et performant, il marqua les débuts d’une longue collaboration entre le constructeur et le motoriste. Il n’est, toutefois, pas très moderne, avec sa boîte à 2 vitesses, et sa transmission par courroie, mais, facile à piloter et surtout très léger, il remplace, avantageusement la ‘Moto Légère’. Collection Philippe Schneberger

Monet Goyon NF 350 cm3 – 1928 à 1933

Ce Modèle ‘Tourisme’, ici dans sa version chromée de 1930, pouvait être livré avec en options compteur et éclairage. Les 350 cm3 étaient alors la cylindrée la plus prisée. Elles proposaient un bon compromis poids /puissance, et permettaient de faire de longs trajets sans problèmes. Collection Dominique Rudler

Koehler Escoffier 500 cm3 K 50 à ACT – 1927 à 1932

Ce modèle étudié et réalisé par Raymond Guiguet, propriétaire ingénieur de Koehler Escoffier est très en avance à son époque avec son arbre à cames en tête et sa fourche télescopique héritée de la Mandoline. Il sera utilisé aussi bien en compétition que sur la route. Performante, mais coûteuse, elle sera très peu vendue, d’où sa rareté aujourd’hui. La K50 ici photographiée, version Supersport de 1927, est ‘dans son jus’ et roule régulièrement sur circuit. Collection Claude Caucal

Monet Goyon 500 type H – 1928 à 1934

Haut de gamme de la fin des années 20 et du début des années 30, cette Supersport était très appréciée pour son moteur MAG réputé et d’une belle finition. Elle succède à la MCS5, en adoptant le nouveau double réservoir en selle. Sa partie cycle est en grande partie commune aux 350 G, et 500 K, et elle évoluera très peu jusqu’à sa fin de carrière exception faite pour sa boîte Sturmey Archer qui remplacera la boîte MG réputée fragile. Ce modèle est capable de plus de 120 km/h. La version photographiée est de 1929. Collection Claude Courtois

Monet Goyon Automouche 250 cm3 GZA – 1929 à 1934

La longue série des Auto-Mouche se complète en 1929 avec un modèle de 250 cm3 plus performant, équipé du moteur de la moto AT, et d’une boîte à 3 vitesses. Sur cette nouvelle version, les sièges ne sont plus en vannerie, mais en tôle. Il est possible d’avoir les 2 places en tandem ou dos à dos ou un seul siège avec un coffre à l’arrière fort apprécié par les représentants de commerce et médecins de campagne. Fraîchement restauré, ce modèle dos à dos GZA de 1929 nécessite une passagère plutôt peu émotive. Collection Arsène Michot

Koehler Escoffier LS4 350 cm3 – 1934 à 1942

Certaines de ces versions Supersport étaient proposées avec des possibilités de gagner encore en puissance. Avec des taux de compression augmentés, on pouvait utiliser des carburants plus performants, voire même avec l’ajout d’adittifs, gagner de précieux chevaux. Ces modèles dits Grand Sport étaient donc montés avec des cales entre cylindre et culasse, qui permettaient en les otant d’augmenter la compression. Cette version est une KLS4C de 1938. Collection Dominique Rudfer

Monet Goyon MG2 500 cm3 bicylindre – 1934

Ce prototype à moteur Villiers (GB) bicylindre de 500 cm3 (construit à seulement 6 exemplaires) sera attelé à un side-car et utilisé par un directeur commercial : Armand Pagneux quotidiennement pour ses trajets : travail, et aussi pour de fréquents voyages sur la côte d’Azur. Cette machine dispose d’une boîte à 4 vitesses Albion, d’un cadre double berceau, et d’une fourche renforcée pour l’utilisation en side-car. Collection Franz Hugrel

Koehler Escoffier LS4 350 cm3 – 1934 à 1942

Super sport dans l’âme ces machines faisaient la fierté de leurs pilotes avides de vitesse. En 350 cm3, leurs 14 chevaux les amenaient à un bon 120 km/h. D’abord en 3 vitesses à la main, puis avec 4 vitesses au pied, elles seront modernisées tout au long de leur production, entre autres avec le graissage par carter sec, les ressorts de soupape en “pincettes” héritage des versions course. La version ci-dessus est une KPLS4s coursifiée de 1936 équipée du moteur le plus puissant dans un petit cadre du 250 type P, dit version “publicitaire”. Collection Yves Azam

Monet Goyon LS5 500 cm3 – 1935 – 1942

Dans la série L, il y a les versions, luxe et grand sport. L’ultime évolution vient avec l’adoption de la suspension arrière développée en compétition pour les records et en rallyes. Dite : type champion de France en rapport avec les victoires obtenues en 1936, cette suspension est simple de conception et ne nécessite quasiment pas de changement sur le châssis. Il est néanmoins monté un rouleau tendeur de chaîne pour avoir une tension constante de celle-ci lors du débattement de la roue. La version LS5LSA de 1938 ci-dessus est le plus haut de gamme juste avant-guerre. Collection Claude Courtois

Monet Goyon 250 R4 – 1949 à 1950

Au même titre que les PS47, la nouvelle 250 de la marque n’est en fait qu’une reprise de la LS3 d’avant-guerre avec un nouveau réservoir Mottaz et une boîte à 4 vitesses par sélecteur au pied. Sa dénomination passe de Super Sport à Utilitaire Normale sur le catalogue ! En 1950, elle devient R4L, en version luxe, sans guère changer pour autant. Cette bonne machine est aussi la dernière quatre temps de Monet Goyon. Elle est ici présentée dans sa version de 1950. Collection Thierry Roussel

Monet Goyon M2V “course 238 cm3 – 1952 à 1954

Pour promouvoir ses modèles, Monet Goyon s’engage dans plusieurs épreuves Bol d’Or, Paris Nice, Paris-Monaco, etc. Pour ces épreuves André Lemardelé conçoit des machines de course sur base de M2V, très modifiée, tant en partie cycle qu’au niveau du moteur, elles seront performantes, et glaneront de beaux succès entre autres au Paris-Monaco de 1953 où quatre M2V terminent premières ex aequo. La version ci-dessus est une ‘série rouge’ ex Bol d’Or du pilote de la marque Henri Gueurce. Collection Franz Hugrel

Beaucoup de motos cette année encore au salon Epoqu’auto à Lyon avec en vedette le stand Monet Goyon-Koehler Escoffier sous l’égide de Thierry Roussel qui n’exposait pas moins de quarante cinq modèles de la marque pour fêter son centenaire. Visite commentée : Il y a tout juste cent ans, en 1916, et en pleine guerre mondiale, [...]

Norton : du café racer au 50 cm3

Après l’effondrement du groupe BSA en 1973, NVT reprend les projets de la marque et continue d’étudier les projets susceptibles d’établir une nouvelle gamme à court terme.

Photos et archives F-M. Dumas/moto-collection.org – Les liens en bleu renvoient aux fiches descriptives des motos concernées

Prototype NVT-BSA de la 500 cm3 P72 en 1975.

^ C’est le cas du projet P72, une 500 cm3 conçue à partir d’éléments existants (499 cm3 (81 x 76 mm) – Compression 10 à 1 – Carburateur Amal ø 30mm – Allumage batterie bobines – Transmission primaire par chaîne duplex – Embrayage multidisque humide – Bloc 4 vitesses – Cadre double berceau – Roues 18 pouces). Le moteur est une version légèrement modifiée de celui équipant la BSA B50 de cross installée dans le cadre double berceau conçu pour les 350 Bandit/Fury en 1971 et monté sur silent-blocs avec le système Isolastic développé par Norton pour ses Commando. Le tube d’échappement se dédouble bizarrement devant le bas moteur, le sélecteur est à gauche selon les nouvelles normes imposées par les États-Unis depuis septembre 1974 et le kick-starter se double d’un démarreur électrique. Trois prototypes verront le jour avec des différences d’équipement. Celui-ci conservé au National Motorcycle Museum de Birmingham a un garde-boue avant de BSA Rocket-3  et une selle biplace Norton. Il est ici badgé BSA, mais il était prévu de le vendre sous label Norton. Hélas le renouveau du gros monocylindre ne viendra pas de Grande-Bretagne et ce projet est abandonné en octobre 1975 alors que NVT accuse une dette de 4 millions de livres sterling.

BSA qui initia le projet pensait sans doute contrer les japonaises avec cette 500 Wulf.
La Norton Wulf est présentée en grandes pompes au salon de Londres en 1975.
Quelle drôle d'idée de reprendre en 1975 un concept fumeux de pistons à deux étages né dans les années 20.

^ NVT hérite aussi de BSA d’une curieuse moto baptisée Wulf (le loup) animée par un moteur bicylindre deux temps équipé de pistons à double étage selon la technique défendue et commercialisée par Dunelt dans les années 20. Un bien curieux dispositif ou la base de plus large diamètre de chaque (lourd) piston se charge de propulser les gaz aspirés vers la chambre de combustion. La Wulf est officiellement présentée au salon de Londres en 1975 et ce sera sa seule apparition publique avant que le projet soit abandonné.

La 900 tricylindre Trisolastic de 1975 et de la 1000 quatre cylindres Quadrant de 1973.

^ Triumph, puis NVT ont également étudié toutes les solutions possibles pour rendre les 750 tricylindres BSA Rocket  et Triumph Trident  concurrentiels. Ils ont ainsi concocté, en 1972-73, la Quadrant que le rajout d’un quatrième cylindre transformait en 1000 cm3. Vint ensuite une Norton « 900 Trisolastic » où le moteur de la BSA Rocket est monté souple avec le fameux système Isolastic, dans une partie cycle de 850 Commando ce qui nécessita un bien curieux tube d’échappement central en Y qui vient se relier aux tubes droits et gauche. Je reviendrai sans tarder sur ces projets qui méritent bien un article spécifique.

L'Ascot de 1976 développée par NVT pour tenter de vendre le montage Isolastic à Yamaha.
Le prototype 650 XS Ascot développé par Bob Trigg en 1976 reprend ici du service en 1984.

^ Pour financer ses coûteux développements et a fortiori celui de ses motos à moteur rotatif Wankel sur lequel il concentre ses ultimes ressources, NVT liquide ses stocks de Commando, entreprend de vendre à Yamaha ses brevets sur le montage souple Isolastic d’un ensemble moteur-transmission. Un superbe prototype est d’ailleurs réalisé par Bob Trigg, co-inventeur du système, avec un XS 650 Yamaha et un montage Isolastic. Une superbe moto au style inspiré du flat track qui ravirait aujourd’hui plus que jamais les amateurs de café racers. Je peux aussi vous affirmer, pour l’avoir essayé plus tard, qu’elle était sacrément efficace. Yamaha ne reprend pourtant pas les brevets de l’Isolastic, mais la firme japonaise offre à Bob Trigg de s’occuper de son Product Planning européen, ce qu’il fera deux ans plus tard après avoir fini son travail le prototype Norton, et je le rejoindrais en 1982 pour une trentaine d’années de collaboration.

Concoctée chez NVT en 1976 avec un moteur XS 650, cette Ascot inspirée du flat track n'a pas vieilli.

^ NVT lorgne également sur le marché florissant des 125 trails et démarche Suzuki pour lui acheter des moteurs de 125/185 TS et Yamaha accepte par ailleurs de vendre à NVT des moteurs de 125 DT/MX qui donneront lieu à l’éphémère BSA 125 Tracker équipé du moteur Yamaha-Minarelli, d’une fourche et de compteurs Yamaha avec un habillage et un cadre mono amortisseur arrière dus à NVT. Dans le même temps Norton rebadge également un cyclomoteur italien à moteur Minarelli qui est vendu sous l’appellation Easy Rider et ces deux productions renflouent plus ou moins les caisses de la maison, mais pas assez pour empêcher que l’usine ferme ses portes en 1978. Cédé à des entreprises privées, le projet de Norton à moteur rotatif survivra pourtant et de versions plus ou moins élaborées continueront d’apparaître pendant plus de quinze ans !

Etude de NVT sur base moteur de Suzuki TS 125.
Version 1979 de la 125 Tracker à moteur Yamaha développée par NVT.
Surprise au salon de Londres 1975 avec ce 50 utilitaire NVT aux côté de la Commando.
Bob Trigg pose sur le NVT 50 Easy Rider
Un beau cyclo sport, siglé BSA et motorisé par un 50 cm3 Minarelli en 1979.
Déclinaison en mini-cross à petites roues du NVT 50 Easy Rider à moteur Minarelli en 1977.
Après l’effondrement du groupe BSA en 1973, NVT reprend les projets de la marque et continue d’étudier les projets susceptibles d’établir une nouvelle gamme à court terme. Photos et archives F-M. Dumas/moto-collection.org - Les liens en bleu renvoient aux fiches descriptives des motos concernées Prototype NVT-BSA de la 500 cm3 P72 en 1975. ^ C’est [...]

Toutes les motos à moteur rotatif Wankel

Le précédent et long article sur les Norton à moteur rotatif m’a valu beaucoup de courrier et nombre de compléments d’enquête sur les autres motos à moteur licence Wankel, une bonne raison pour établir une liste aussi exhaustive que possible, de tous les constructeurs ayant testé cette technologie.

L’Allemagne de l’Ouest et de l’Est, l’Angleterre, le Japon, la France même par délégation avec le Van Veen à moteur Citroën Comotor, tous les grands pays producteurs, à l’exception semble-t-il de l’Italie, se sont laissés tenter par les promesses du moteur de Felix Heinrich Wankel, et encore, ne parle-t-on ici que des motos, car bien d’autres expériences ont eu lieu dans d’autres domaines, des tondeuses à gazon aux générateurs en passant bien entendu par les automobiles dont Mazda est le plus persévérant représentant. (Toute l’histoire du moteur Wankel en automobile sur le site Lignesauto : ICI)

Plus de dix marques de moto ont testé le Wankel de 1951 à 1995

Les dates indiquées sont approximatives. On sait quand ont été dévoilées ces études et on connaît les dates de production des versions commercialisées, mais il est impossible de savoir quand ces développements ont débuté et certains sont restés secrets.

NSU : 1951 – 1956

On résume. Le 20 décembre 1951, la société de Felix Wankel à Lindau se lie par contrat au services R & D de NSU (qui ne fabrique alors que des motos) pour étudier un moteur à piston rotatif. De ses travaux naît début 1954, un moteur rotatif avec une chambre épitrochoïdale (en forme de huit) qui fonctionne suivant le cycle à quatre temps. Dans ce moteur, connu sous l’acronyme DKM (DrehKolben motor), le rotor interne en triangle et son cylindre en huit tournent sur des axes séparés à l’intérieur d’un carter. Cet ensemble n’est pourtant pas prévu comme un moteur, mais comme un compresseur. Il est utilisé pour la première fois en 1956 sur le moteur ZW 50 développé par NSU, une fabuleuse mécanique dont l’admission et l’échappement latéraux passent par des distributeurs rotatifs ; l’étanchéité est assurée par les mêmes matériaux céramiques développés par Félix Wankel pour le rotor de son moteur rotatif. De 15 ch en version atmosphérique le ZW passe à 20,4 ch à 16 000 tr/min avec ce compresseur Wankel et peut atteindre 20 000 tr/min. Grâce à lui le cigare de record NSU bat plusieurs records du monde en catégories 50 et 75 cm3 le 9 août 1956 en atteignant 196 km/h sur le lac salé de Bonneville aux États-Unis.

En février 1957, un premier prototype de ce Wankel utilisé cette fois comme moteur est installé sur un banc d’essai par le département R&D de NSU à Neckarsulm. Cet NSU/Wankel DKM 54 d’une cylindrée équivalente 125 cm3 donne une puissance au banc de 29 ch à 17 000 tr/min, mais sa conception à rotor extérieur (DKM) est bien peu propice au montage sur un véhicule de série. En 1958, NSU abandonne le DKM pour un train planétaire KKM (Kreiskolben motor) beaucoup plus simple, développé par Hanns Dieter Paschke. Le carter extérieur ou stator est alors stationnaire et le piston ou rotor tourne sur son arbre excentré. Ce moteur KKM 125, la base de tous les moteurs type Wankel qui vont suivre, est testé au banc en juillet 1958 avec une puissance qui va de 21 ch/8000 tr/min à 30 ch/14 000 tr/min. Hélas, si le moteur tourne bien, la moto tourne mal ! NSU qui était encore en 1955 le n° 1 mondial avec une production annuelle d’environ 300 000 motos subit de plein fouet la crise (ses ultimes motos sortiront en 1963). En 1964, la production motocycliste totale de toutes les firmes de l’Allemagne de l’Ouest n’est plus que de 240 000 unités (50 cm3 + motos). Dès 1955/56, les bureaux d’études de NSU se tournent vers l’automobile avec la Prinz qui sauvera la firme et sera la première automobile à moteur rotatif.

MZ – 1960 – 1965

Le constructeur de l’Allemagne de l’Est achète la licence Wankel en 1960 et construit cette même année son premier prototype avec un monorotor à refroidissement liquide logé dans la partie cycle de l’IFA BK 351 avec une transmission par arbre. Cinq ans plus tard est présenté une moto beaucoup plus aboutie avec un monorotor de 175 cm3 refroidi par air greffé sur le bas moteur d’une ES 125/175. Le projet est abandonné, mais il faillit bien avoir une suite fin 2008. MZ qui a été mis en liquidation en 1991, a été ensuite repris en 1996 par le Malais Hong Leong Industries qui ferme à nouveau les portes de l’usine de Zschopau en 2008.  Une ultime tentative de reprise est alors étudiée avec la société Wankel AG (repreneuse en 2002 l’ancienne société Wankel en faillite) spécialisée dans les petits moteurs rotatifs pour avions légers et karts qui tente de monter un plan de restructuration avec l’aide du gouvernement local pour produire une moto sportive à moteur Wankel. L’entreprise tourne court.

Norton : 1969 – 1992

BSA, d’abord, puis Norton et le groupe NVT arrivent très péniblement à commercialiser une moto à moteur rotatif après des années de développement. Toute l’histoire est dans mon précédent article sur ce blog et dans les fiches sur l’Interpol et la F1 de 1990.

Sachs- Hercules : 1970 – 1978

Sachs-Hercules qui vend aussi ses produits sous label DKW fut le second acheteur de la licence Wankel le 29 décembre 1960. Il est le premier constructeur à mettre sur le marché une moto dotée de ce moteur, la W 2000 animée par un monorotor refroidi par air initialement conçu pour une moto-neige. Les premiers prototypes sont dévoilés en 1970 au salon allemand de Cologne avec une transmission secondaire par arbre. La version définitive, avec une transmission finale par chaîne, est présentée au salon de Cologne fin 1973 et commercialisée de 1974 à 1978 avec des évolutions mineures, dont un frein avant à disque en 1975 et un graissage séparé pour les derniers 199 exemplaires (les premiers marchaient au mélange comme les deux temps). « Gut für 100,000 km » annonçait la publicité, il ne s’en vendit pourtant que 1800 exemplaires et l’outillage de production fut revendu à Norton. On note au passage qu’il y eut même une version enduro sur la base de la même mécanique qui participa au Six Days Trophy à l’Ile de Man en 1975 et un Sachs Wankel développé pour la course fort de 50 chevaux au banc.

Honda – Kawasaki : 1970 – 1976

Honda et Kawasaki ont eux aussi développé des prototypes sur base du moteur Wankel au début des années 70, mais ces expériences sont que des prototypes d’étude. L’expérience Honda est restée à un tout premier stade avec un monorotor refroidi par air hâtivement adapté sur un bas moteur et un châssis de 125 K5 sur un prototype A16 CRX fin 1972. Le projet X99 de Kawasaki, réalisé vers 1976 sur un chassis et habillage de Z650, est beaucoup plus évolué avec un bi-rotor à refroidissement liquide. Il est conservé au musée privé de l’usine où j’ai pris ces photos.

Van Veen : 1972 – 1978

L’Hollandaise Van Veen fait ses premiers tours de roues en 1972 et annonce déjà 100 ch au banc avec un moteur Mazda logé dans une partie cycle de Guzzi. Considérablement plus élaborée, la version définitive dévoilée au salon de Cologne de 1974 est dotée d’un moteur bi-rotor Comotor 624 de Citroën GS refroidi par eau et huile. Elle est commercialisée en 1978 et sera chronométrée à 213 km/h. Elle ne se vendra qu’à 38 exemplaires seulement entre 1978 et 1981.

Yamaha : 1972 – 1973

La très élégante Yamaha RZ 201 présentée fin 1972 au salon de Tokyo aurait pu répliquer à la Suzuki RE-5. Bien inspiré, Yamaha s’abstint de la lancer en série une production pourtant toute prête. Plus évolué que celui de la Suzuki qui n’avait qu’un seul rotor avec une admission périphérique, le Yamaha était un bi-rotor doté d’une admission latérale alors.

Suzuki : 1973 – 1977

La Suzuki RE-5 monorotor (siglée RX-5 lors de sa présentation au salon de Tokyo en 1973), fut un échec cuisant qui faillit mener Suzuki à la faillite. Lourde, encombrante, peu maniable et peu performante (62 ch pour 230 kg à sec), elle était desservie par une consommation excessive et une esthétique trop originale (ne serait-ce que par son tableau de bord et son feu arrière englobés dans de curieux cylindres). Elle souffrit aussi de maints problèmes techniques et il ne s’en vendit en France que 96 exemplaires.

Ural – Dnepr – IZH : 1974 – 1989

Ural comme Dnepr ont également tenté l’aventure du rotatif. Le très actif site dnepr.ural.free.fr auquel j’emprunte les photos publiées, donne peu de renseignements sur le prototype Ural, mais Dnepr développa toute une série de prototypes à partir de 1974.  Le premier type RD-501B en 1974 avec un rotatif monorotor de 495 cm3, copie sans licence du Wankel. Il annonce 38 ch à 6300 tr/min. En 1985 apparaît une RD-660 de ligne très moderne animée cette fois par un bi-rotor refroidi par air de 660 cm3 fort inspiré par Norton/NVT et doté d’une transmission par chaîne.  Deux ans plus tard, en 1987, la RD 515 reprend le modèle du Sachs monorotor en lui ajoutant un refroidissement liquide qui lui permet d’atteindre 50 chevaux. Il est accouplé à une boîte et une transmission acatène de Dnepr. La version RD 517 reprend apparemment la même mécanique avec une apparence modernisée avec des roues en alliage léger. La Rotor V-500, enfin, ultime tentative dans le rotatif semble utiliser le même moteur de 50 ch peint en noir et encagé dans un habillage délibérément moderne avec petit tête de fourche et selle biplace à dosseret. De beaux efforts qui témoignent d’une réelle volonté de l’entreprise soviétique de s’aligner sur le marché international. Cette belle tentative restera malheureusement au stade du rêve ; Dnepr déjà pauvre, avait misé sur le mauvais cheval en se ruinant comme ses congénères dans l’entreprise. On verra aussi en 1989 la Rotor-Super, une étonnante réalisation entièrement carénée, signée par IZH, le plus ancien constructeur de moto soviétique créé en 1929.

Pas mort, le rotatif ?  

Quelques ingénieurs continuent à rêver à ce moteur plus simple, plus léger et plus compact, Crighton en Grande Bretagne travaille sur sa CR700P racing qui annonce 200 chevaux, un couple de 135 Nm à 9500 tr/min et un poids record de 136 kg tandis qu’en France Furion motorcycles developpe sa M1, une étonnante super sport hybride avec un Wankel associé à un moteur électrique. Le moteur Wankel n’est décidément pas mort et sa compacité pourrait bien lui donner un nouvel avenir justement dans les véhicules hybrides.

Photos F-M. Dumas, archives moto-collection.org et usines, archives Wilhelm Herz, sites web : dnepr.ural.free.fr, moto-station.com, crighton-racing.com, furion-motorcycles.com, et divers sites historiques sur le moteur Wankel dont je m’excuse de n’avoir pas noté l’adresse.

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Le précédent et long article sur les Norton à moteur rotatif m’a valu beaucoup de courrier et nombre de compléments d’enquête sur les autres motos à moteur licence Wankel, une bonne raison pour établir une liste aussi exhaustive que possible, de tous les constructeurs ayant testé cette technologie. L'Allemagne de l'Ouest et de l'Est, l’Angleterre, [...]

Norton Rotary : le cadeau empoisonné de BSA

Le Wankel, c’est l’avenir, pense BSA en 1969 et le groupe britannique lance à grands frais l’étude d’une moto à moteur rotatif que va reprendre NVT, Norton Villiers Triumph, après faillite de l’empire BSA en 1973. Un cadeau vraiment empoisonné.

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L’idée du moteur rotatif naît dans les années 30 où le docteur Félix Wankel développe à Lindau ce curieux concept d’un piston rotatif plutôt qu’alternatif. Après guerre, Félix rejoint NSU et y perfectionne son projet qui passionne tous les motoristes mondiaux. Ce moteur léger, compact et pratiquement exempt de vibrations, offre des qualités bien séduisantes en particulier pour la moto. Son problème majeur est le refroidissement du rotor interne et sa gourmandise n’inquiète alors pas trop les techniciens. La crise du pétrole n’est pas encore là.

Après Curtiss-Wright pour l’aéronautique en 1958, NSU et Mazda pour l’automobile, deux marques reprennent successivement les brevets en 1960. MZ, qui développe la première moto à moteur rotatif dès 1965, puis Fichtel & Sachs qui produira la première moto rotative de série, l’Hercules 2000, en 1974. Les brevets ont entre-temps été rachetés par Yamaha, Honda, Kawasaki et Suzuki qui sera le seul à commercialiser son projet, le mono rotor RE 5 présentée au salon de Tokyo 1973. Sans oublier la très belle Van Veen 1000 OCR dont il ne sera produit qu’une dizaine d’exemplaires. Séduit, comme toute l’industrie, BSA/Triumph prend une option sur l’utilisation de ces brevets en 1969 et engage David Garside, un jeune et brillant ingénieur pour étudier la faisabilité d’une moto ainsi motorisée. L’expérimentation commence avec le monorotor Sachs de 294 cm3 que l’équipe de Garside fait passer de 18 à 32 ch et l’avenir s’annonce radieux pour ce projet sur lequel près de 240 personnes du service R&D de BSA-Triumph travaillent en 1970. Hélas, le groupe sombre et il ne reste plus que neuf personnes en charge de ce développement en 1972. Les actions BSA dévissent brutalement en mars 1973, le groupe BSA dépose son bilan et le gouvernement charge alors Dennis Poore, responsable du Manganese Bronze Holding déjà propriétaire de Villiers et AMC (AJS-Matchless-Norton), de redistribuer toutes les branches de l’énorme empire BSA qui comprend les Lancashire cars, les taxis londoniens, la construction de machines outils, et nombres d’autres activités. Denis Poore scinde le groupe en deux : toutes les productions en bonne santé passent sous l’égide du Manganese Holding et Daimler est vendu à Jaguar tandis que la moto, éternel parent pauvre, est regroupée par NVT – Norton-Villiers-Triumph (un acronyme où le nom même de BSA a disparu bien qu’il soit propriétaire de Triumph depuis 1951 !).

Transféré au R&D de Norton, David Garside, assisté par le célèbre Doug Hele, ancien boss technique de BSA, convainc Denis Poore, d’abandonner tous les autres projets pour concentrer ses maigres moyens sur le rotatif dont les premiers gros investissements ont déjà été réalisés par BSA. Pour tous les constructeurs planchant sur le Wankel, le gros problème est le refroidissement. Pour un même nombre de tours, il y a avec le rotatif, deux fois plus de phases de combustion que sur un moteur quatre temps à piston, le moteur est beaucoup plus compact et son rotor est bien difficile à refroidir. Sachs tenta de résoudre le problème en faisant passer l’air admis par l’intérieur du rotor, mais le mélange envoyé ensuite dans le moteur était trop chaud et faisait tomber la puissance. Garside améliore l’idée en renvoyant l’air réchauffé par son passage dans le rotor vers une chambre de tranquilisation d’environ 5 litres d’où il repart vers le carburateur avec un mélange qui est passé de 100 à 50° C.

Garside et Doug Hele optent finalement pour un birotor de 588 cm3 conservant les côtes internes du monorotor de 294 cm3 précédent. Il est largement aileté et incliné de 15° vers l’arrière par rapport à son axe principal de manière à ce que la face du trochoïde située entre la bougie et l’échappement soit face au flux d’air. L’esthétique est tout à fait réussie et, c’est important, parfaitement acceptable par les motocyclistes d’alors choqués par le refroidissement liquide sans ailettes. Ce beau moteur qui pèse 45 kg est suspendu sous le cadre par deux tunnels plats en fonderie d’alu qui servent à transférer l’air de refroidissement interne des rotors vers la chambre de tranquilisation. Il est testé sur une base d’une Triumph Bandit « P39 » en 1973 qui atteint déjà les 70 chevaux puis d’une Norton en 1974 qui reprend l’habillage et l’accastillage de la Commando avec un cadre poutre supérieur et la chambre de tranquilisation au-dessus du birotor.

Norton rachète en 1977 les machines outils spécifiques au moteur Wankel à Sachs–Hercules et la future Rotary, devenue P42 en 1976, reçoit un nouveau cadre avec une grosse poutre supérieure rectangulaire en tôle d’acier de 1,5 mm qui fait office de réservoir d’huile de quatre litres dans sa partie arrière et de chambre de tranquilisation sur l’avant. Le birotor est accouplé à une boîte de Triumph T140. Dennis Poore est persuadé que sa « Rotary » développée à l’usine de Shenstone va remplacer la dernière Norton Commando sortie des chaînes en 1977 et ramener sa marque au premier plan en équipant des motos, des bateaux, des pompes et des générateurs, y compris, c’est prémonitoire, pour recharger les batteries de voitures hybrides à moteurs électriques.

Hélas, NVT va de plus en plus mal. En 1975, l’équipe du R&D à Kittsbridge ne compte plus que trois personnes, dont David Garside. Devenu le seul constructeur de moto à persévérer dans le rotatif avec son birotor refroidi par air, Norton continue sa mise au point de 1979 à 1982 et, en 1983, les machines de test couvrent près de 50 000 kilomètres en dix semaines avec l’assistance semi-bénévole de la police et de quelques passionnés.

Cette même année, Garside développe une version à refroidissement liquide du birotor prévue initialement pour l’aéronautique et en vend la licence à une société américaine, mais la crise met fin au projet excepté pour un monorotor NR-731 refroidi par air qui pèse à peine plus de 10 kg et développe 38 ch dont Norton vend 75 exemplaires pour des drones militaires (eh oui, déjà !).

En 1984 le birotor est enfin en production, pour la Police, et la version à refroidissement liquide est en plein développement. Ce sont pourtant des versions à air dont la RAF et la RAC commandent cent exemplaires en 1986. « Nous avons passé plus de temps à résoudre les problèmes du birotor à air qu’il ne nous en aurait fallu pour mettre la version liquide en production » se lamente Garside.

Sans moyens et avec une équipe réduite, les temps de développement sont si longs que les versions prévues sont perpétuellement en retard sur la mode et sur les puissances comparées aux modèles concurrents ; les premiers moteurs atteignent 72 chevaux, puis passent à 82 ch. Atteint par un cancer de la moelle osseuse, Denis Poore se décide à vendre la société et meurt en février 1987. C’est un jeune financier sud-africain de 35 ans, Philippe Le Roux, qui reprend les rênes de Norton Motors et décide de produire sans délai 100 unités de la version à air qui sera instantanément vendue sur catalogue en décembre 1987 pour 6000 £. Il charge ensuite Brian Crighton, ancien pilote et concessionnaire, de développer une version course avec d’indéniables succès sur circuits, mais aucune suite commerciale. En 1992, l’écurie Norton perd son principal sponsor Imperial Tobaccos. Les ultimes Norton rotatives sous les couleurs de Duckhams apparaissent en course pour la dernière fois en 1996.

Le Wankel, c’est l’avenir, pense BSA en 1969 et le groupe britannique lance à grands frais l’étude d’une moto à moteur rotatif que va reprendre NVT, Norton Villiers Triumph, après faillite de l’empire BSA en 1973. Un cadeau vraiment empoisonné. Cliquer sur les photos pour accéder au diaporama et aux légendes L’idée du moteur rotatif naît [...]

Exclusif : J’ai roulé sur la nouvelle Honda Gold Wing

Scoop mondial « J’ai roulé sur la première Honda Gold Wing », non, pas celle présentée au salon de Tokyo 2018 dans quelques jours, mais la toute première 1000 en 1974. 43 ans plus tard, on peut enfin revenir sur les coulisses de l’exploit.

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Impossible d’imaginer un tel « buzz » aujourd’hui. Développée dans le plus grand secret, la Gold Wing n’avait encore été vue par personne et les trois premiers exemplaires prévus pour la presse des différents marchés mondiaux étaient de couleur différente pour qu’on puisse bien repérer les fuites, si fuite il y avait. Présentation prévue en grande pompe le 21 septembre en ouverture du Bol d’Or sur le circuit Bugatti au Mans.

C’était alors la guerre ouverte entre Moto Revue, où je travaillais encore, et Moto Journal que Pierre Barret venait de lancer quelques mois plus tôt.

Et merde ! Le Moto Journal qui sort le jeudi 19 septembre affiche un Gold Wing jaune-orangé en couverture avec une présentation complète dans les pages intérieures largement annoncée comme venant « d’une indiscrétion américaine ». De fait, je l’apprendrai plus tard, le modèle prévu pour la présentation aux États-Unis était bien rouge-orange, et l’attaché de presse de Honda USA a dû, je crois, plier bagage sur le champ. Pas de chance, la photo de Moto Journal venait bel et bien de l’importateur français et avait été habilement colorisée aux couleurs de la version US pour dissimuler la supercherie. Pierre Barret avait fait très fort.

Suprême vexation pour Moto Revue, chaque arbre de la route menant au Bol d’Or, organisé par MR comme chacun sait, était flanqué d’une affichette avec MJ et la Gold Wing.

Il fallait réagir et Honda accepte de me confier la précieuse et unique 1000 Gold Wing en Europe pour une petite heure sur une discrète bretelle privée d’accès au circuit dans les heures précédant le départ. Panique à bord, tout le staff Honda est là et donne un dernier coup de chiffon à la moto arrivée en camionnette. Vite une série de photos statiques et de détails et je pars sous les multiples recommandations de Honda. Pour tout faire dans le moins de temps possible, je suis venu avec deux photographes, Philippe Folie-Dupart, l’officiel de Moto Revue, et Philippe Cornut un photographe indépendant qui, accessoirement, a son studio dans le même immeuble que moi. L’un reste sur le bord de la route, l’autre me précède, assis dans le coffre d’une voiture. Erreur de casting, je n’ai ni casque ni gants… tant pis. Je vais faire sans sur quelques kilomètres avant de vite rendre la Gold qu’attendent impatiemment Jean-Claude Chemarin et Gérard Debrocq pour effectuer chacun un tour de chauffe devant la meute des pilotes du Bol et les quelque 100 000 spectateurs annoncés là. (S’cusez, je suis arrivé un peu vite… la photo est floue !).

Une telle primeur, ne doit pas rester cachée et comme j’étais alors correspondant de journaux moto dans la plupart des grands pays je me suis empressé d’envoyer ma présentation-prise-de-contact (non, je n’ai pas dit essai !) aux quatre coins du monde où elle a été publiée plus de dix fois : en Couverture de Motorcyclist, le n° 1 japonais, dans Motociclismo en Italie, Das Motorrad en Allemagne, Solo Moto en Espagne, Moto 80 en Hollande, Motor Cycle en Grande-Bretagne, etc.

4 723  Gold en cinq ans : de l’or dans l’aile !

Hervé Guio, alors directeur de Honda France, qui coule maintenant des jours heureux sur les bords de la Méditerranée, se souvient lui aussi, non pas de cet épisode mouvementé de la présentation officielle, mais de la carrière brillante de la Gold, qui ne pouvait mieux porter son nom. « Comme chaque pays avait alors ses propres normes d’homologation, l’usine Honda de Tokyo produisait d’un coup le millier d’exemplaires destiné à la France et nous les envoyait le stock. Cela impliquait évidemment de gros frais financiers, de stockage, etc, mais nous avions alors une marge, inimaginable aujourd’hui, de 40 % ! Les concessionnaires (qui ont de nos jours de 10 à 14 % dans le meilleur des cas) margeaient alors à 18 % plus la remise accordée en fin d’année. Une période en or. En 1976 ou 77, on avait reçu 800 Gold Wing d’un coup et elles étaient toutes vendues d’avance. Inutile de vous dire la réaction du directeur financier qui a encaissé en une fois les bénéfices sur 800 Gold ! ». Petit coup d’œil sur les statistiques : Honda a vendu 764 Gold Wing à 20 060F en 1975, 1288 en 1976 (à 20 910 F), 914 en 1977, 1049 en 1978 et 708 K4 en 1979 plus peut être quelques GL 100 et 1100 DX qui débarquent cette même année où Honda France réalise un score record de 57 156 machines (y inclus 7870 cyclomoteurs) vendues dans l’hexagone… On comprend mieux que la grande maison ait alors décidé de quitter Bagnolet pour faire construire de vastes locaux (toujours occupés en partie) à Marne-la-Vallée.

La fiche technique de la Honda 1000 Gold Wing de 1974 est ICI, celle de la K3 de 1979, ICI et celle de la 6 cylindres de 1988, ICI.

Les photos de la nouvelle Honda Gold Wing 2018 présentée au prochain salon de Tokyo sont empruntées à Moto-Station.com

Scoop mondial « J'ai roulé sur la première Honda Gold Wing », non, pas celle présentée au salon de Tokyo 2018 dans quelques jours, mais la toute première 1000 en 1974. 43 ans plus tard, on peut enfin revenir sur les coulisses de l'exploit. Cliquer sur les photos pour accéder au diaporama et aux légendes. Impossible d’imaginer [...]