Salon du 2 roues – Lyon #2 : Les vieilles en vie

En deux jours, j’ai piétiné 14 km et je n’ai même pas tout vu, mais je vais tenter de vous donner un aperçu de ce qui le plus plu.

Ce qu’il y a d’extraordinaire dans ce Salon du 2 Roues, c’est que nos motos anciennes y sont totalement dépoussiérées. J’étais plutôt septique au départ sur ce mélange des ancêtres et du neuf sur les milliers de m3 des 7 halls en étoile du salon. Il existait bien quelques regroupements, mais quand même, il fallait marcher. Sûr, si vous ne vouliez voir QUE des vieilles ou QUE les dernières nouveautés, c’était des kilomètres en trop, en revanche ce mixage poussait les jeunes à s’étonner devant les ancêtres et les collectionneurs découvrir les dernières évolutions, même à reculons. Notre monde des collectionneurs, souvent si replié sur lui-même, s’en sortait réintégré au monde d’aujourd’hui et c’était bien.

par FMD

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L’Intrépide

Si une animation a fait beaucoup pour dépoussièrer (et aussi empoussièrer par ailleurs !) l’image de la moto ancienne, c’est bien l’Intrépide, un grand anneau de motocross à l’ancienne organisé par Sébastien Chiraz. Régle n°1 : les motos doivent être d’avant-guerre, règle n°2 : leurs pilotes sont obligatoirement en tenue d’époque. Pour faciliter leur tâche Sébastien Chiraz est également le créateur de “Piece of Chic” qui vends des vêtements et accessoires d’habillement dans le style motocycliste des années 30.

Le maître des lieux himself était l’un des concurrents les plus assidus sur sa Terrot 350 HST souvent suivi par Jean-Paul Tardy, spécialiste es-Motosacoche, avec durant une après-midi entière une charmante demoiselle hilare qui faisait ses premières armes sur un New Map 100 Baby prêté par Fred Agnel de l’atelier Entretubes. Elle n’était jamais montée sur une moto ! Beau début, non ?

Des Françaises

Que serait un salon français si notre pays n’y était pas à l’honneur. Il y avait bien sûr Motobécane, mais aussi une haie d’honneur dans le hall central de la grande entrée avec quelques constructions artisanales qui ont marqué leur époque. L’ABC-Barthélémy (1) qui reprenait et fiabilisait au milieu des années 30, la fameuse ABC-Gnome & Rhône des années 20, une CMR 750 R73 de 1946 (2), la BMW qui n’a jamais existé chez BMW, construite après-guerre en France avec les stocks des Allemands en utilisant le moteur de la R75. Une 850 Tigre à moteur Panhard (3), une réalisation particulièrement homogène de Jean-Paul Buche qui fit beaucoup parler d’elle en son temps. Toujours en hommage à nos artisans nationaux, Claude Caucal et Claude Scalet avaient réuni sur le stand Nougier (4) un bel échantillonnage de la production de Jean Nougier à Saint-Andiol : la 350 Quatre cylindres  dont la reconstruction vient d’être terminée, la 250 double ACT de 1962 (4) (née en 1957 en 175 cm3) et basée sur le bloc moteur très modifié de la OSSD, le 50 cm3 double ACT de 1964 (5) qui attend sa partie cycle originale en reconstruction et la 250 bicylindre deux temps de 1972 (6) championne de France en National avec André Kaci. Quittons l’artisanat pour une petite usine, et une mention spéciale pour le club des motos Gautier avec 6 motos (7) et un peu d’humanité dans ce monde trop mécanique. Notez qu’on pouvait aussi voir les Gauthier (8) sans leurs accompagnatrices. Au hasard des stands, un beau Peugeot 50 BB3 SP de 1960 (9) et, dans le hall réservé à la mobilité de demain, la marque Radior renée de ses cendres avec des vélos électriques, présentait aussi leur ancêtre, la BMA Radior 100 Radiorette de 1936 (10). Dommage, le Salon du 2 Roues faisait l’impasse sur le côté documentation et bourse, un manque heureusement rattrapé par le stand Chambrier (11) avec les pièces accessoires indispensables à nos ancêtres. La FFVE enfin, présente pour la première fois au Salon du 2 Roues, y rendait hommage aux centenaires de Motobécane et à celui de Dollar avec cette belle Dollar 350 KSS de 1929 (12) à moteur Chaise à ACT.

Une mention spéciale pour la bande des Triplettes de Bonneville qui avait recréé une tranche de son lac salé favori pour y exposer toutes ses délirantes réalisations de record.

Les MGC

Autant vous le dire de suite, et sans aucun parti pris, la MGC est pour moi la plus belle des motos françaises et, mondialement, l’un des plus beaux dessins jamais vus. Il faut bien avouer que, jusqu’à une période récente où les cadres à larges poutres d’aluminium et les carénages divers font de la moto un ensemble, nos deux-roues n’étaient qu’une superposition d’éléments : un moteur, un réservoir, une selle, un phare, deux roues. La personnalisation ne venait que des formes et couleurs de chaque élément. Avec la seconde mouture de ses réalisations à cadre-coque en fonderie d’alliage léger, Marcel Guiguet arrive pour la première fois dans l’histoire du style motocycliste à réaliser un tout autour d’un thème : la Cigogne de son emblème. La boîte à outils sur le garde-boue avant est le bec, la coque réservoir et son prolongement sont le corps et les pattes dont les extrémités sont représentées par les échappements en aluminium. 

Très forte, la performance de Dominique Buisson, le pape des MGC, qui réussit, au prix de nombreux transports, à réunir 16 MGC, un pourcentage remarquable quand on sait qu’il n’en fut produit qu’environ 250 de 1929 à 1936. Tous les modèles et leurs variantes étaient là et tous les moteurs utilisés, châssis 1re génération dit en oeuf avec leur gros réservoir ventru, et seconde génération “en cigogne” décrite plus haut avec petit ou grand châssis et deux types de fixations. En gros, la MGC est un sandwich avec une coque en haut qui sert de réservoir, passage de câbles, etc., et une coque en bas qui va de l’axe de roue arrière à la fixation du moteur. En incorporant un réservoir d’huile et, sur les grandes versions, un boîtier de connexion de la commande des freins couplés. Les deux coques sont reliées par sept tirants en acier.

La visite débute avec les trois MGC première version de 1929 (1), dites en Œuf, ou Ecrémeuses, rarissimes, car beaucoup de propriétaires y ont monté les nouvelles coques. 16 MGC exposées (2), c’est un record et il aurait pu être meilleur encore si on y avait réuni deux autres modèles finis et l’un en cours de reconstruction exposés chez les Rétrocyclettes Villeneuvoises.

En vedette en tête du stand, une MGC 350 N3 de 1931 (3), la dernière restauration de l’atelier Entretubes que Fred Agnel a peinte en noir, une couleur bien peu usuelle pour les MGC. Il s’agit là des premières MGC avec la nouvelle coque, mais le châssis et la fourche ne sont pas de la dernière génération et les échappements sont de classiques queues de carpe.

Une belle lignée de six 350 et 500 N3 (4). Vue de dessus la deuxième de la lignée précédente en version luxe chrome et chamois, est une 500 N3A de 1931 (5), elle aussi avec l’ancien châssis et l’ancienne fourche Brampton, mais avec les nouveaux silencieux en “pattes de cigogne” frappées du sigle MGC. Le fabuleux tableau de bord comprend compteur, montre 8 jours, ampèremètre, commodo, jauge à essence et interrupteur d’éclairage du tableau. J’ai eu ça devant les yeux pendant plus de 10 000 km et j’en suis encore émerveillé.

Avec le moteur JAP 250 Racing ou un 350 tourisme, comme ici sur une réplique de 350 N3L (6) reconstruite avec des pièces d’origine Marcel Guiguet, le constructeur de Corbelin, utilisait un petit châssis dit à grandes oreilles.

Les Villeneuvoises

Toujours aussi présente en quantité comme en qualité, l’Amicale des Rétrocyclettes Villeneuvoises présentait une bonne dizaine de machines dont une MGC 500, une 250 petit châssis et une 350 en cours de reconstruction sur la base de pièces originales. On a aussi particulièrement admiré une Peugeot 105 de 1928(1) le premier monocylindre culbuté construit chez Peugeot, présentée en 1927 et produite jusqu’en 1936, une lyonnaise, l’Ultima 500 C1 bicylindre en V de 1928 (2), une Terrot 350 HSSP de 1937 (3), comme sortie d’usine et une Automoto 350 A17 de 1931 (4) à soupapes latérales qui marque l’absorbsion de la marque stéphanoise par Peugeot qui lui imposa ce bloc moteur rebadgé. A noter que le président des Rétrocyclettes, François Lejars, dirige aussi le club des motos Gauthier qui exposait six machines dans un autre hall.

Trails et Scramblers

On a tous eu nos amours de jeunesse et pour moi les trails et scramblers y tiennent une grande place, alors pensez si j’étais content en tournant autour de la mer de sable entourée de piquets de bois concoctée par Jack Monchanin et Michel Vandamme au beau milieu du hall 5. Ils étaient tous là, même ceux qui, en leur temps, étaient réservés aux Japonais ou aux Américains qui lancèrent cette vogue des scramblers.

Dans l’ordre d’apparition : la mer de sable avec au centre une Mehari, toujours présente quand il faut faire penser aux vacances, une Kawasaki KS (1) et la meute des scrambler. On commence par la Honda 250 CL 72 (2) scrambler de 1964.  Elle était d’ailleurs en compagnie de la première version de 1963, beaucoup plus rare avec ses garde-boue en aluminium poli et plein de subtiles différences. Chronologiquement c’est une Kawasaki qui arrive ensuite, une 650 W2 TT Commander (3) de 1965 sur laquelle son propriétaire, et c’est son droit, a préféré monter le le phare avec compteur de vitesse et compte-tours intégré du modèle route plutôt que l’instrumentation séparée d’origine sur les tout terrain. On revient chez Honda avec une 300 CL 77 de 1967 (4) suivie par l’un des best-sellers de la marque aux États-Unis, le CT 90, ici de 1968 (5), qui se déclina dans de multiples variations dont fort peu furent importées chez nous. La même année 1968 apparaissait la Honda 450 à double ACT ici dans sa version CL 450 Scrambler (6) qui allait faire très peur aux plus grosses 650 bicylindres britanniques. Pour faire bonne mesure, la CL450 se doublait de toute une gamme dont cette CL 175 (7) bicylindre à simple ACT de 1969. Sale affaire pour la BSA 650 Firebird Scrambler (8) coupleuse en diable, mais aussi fort fragile si on la sollicitait trop. En 1970-71 Honda double sa série CL par la gamme des SL, plus orientée tout terrain, plus légères, mais parfois étrangement moins puissantes, mais peut-on se fier aux catalogues qui donnaient cette SL 350 de 1971 (9) pour 147 kg, 25 ch à 8000 tr/min et 2,5 kgm de couple à 6000 tr/min alors que la CL de la même année affichait 33 ch/9500 tr/min et 2,8 mkg pour 156 kg. Si tous ces beaux scramblers ont rarement vu l’Europe, ce ne fut pas le cas de la si belle Honda 250 XL Motosport (10) qui nous enthousiasma en 1973. La série CL Honda vit ses derniers moments en 1973 avec cette mouture K5 de la CL 350 (11) tandis que la reine de trail est la brutale, mais si attachante RT 360 (12) dont nos mollets gardent un cuisant souvenir. Curieusement la Suzuki TS 400 (13) a moins marqué son temps en dépit de ses réelles qualités. En ce début des années 70, le marché qui explose en France est celui de la 125 avec entre autres la Suzuki TS 125 (14). En revanche, nous ne connaîtrons pratiquement pas en nos frontières cette énième évolution du CT90 de 1978 (15). J’aurais pu faire une suite à cette longue revue des trails et scramblers avec un catalogue semblable du Honda Monkey et de ses multiples dérivés, mais il faut savoir s’arrêter et vous devrez vous contenter de ce beau  ZB 50 de 1988 (16).

Trial

Le trial à l’ancienne, c’est aussi un beau morceau de notre histoire motocycliste. En statique (exceptionnellement !), il était représenté par Jean Cailllou et Olivier Barjon et leur association Works Trials Bikes qui, comme son nom l’indique, n’accueille que des motos d’usine ou d’exception. Le stand exposait six de ces machines mythiques. La Suzuki Gaunt de 1967, est extrapolée de la Suzuki TC120 à boîte relais 3 x 2 vitesses portée à 228 cm3. Son constructeur, Peter Gaunt, remporta avec elle la catégorie des moins de 250 cm3 aux Scottish 6 Days de 1967 et Dennis Jones fut à son guidon vice-champion d’Europe en 1969.

McLaren en trial vous y croyez, vous ? Et bien si pourtant. L’histoire débute en 1971 ou McLaren sous-traitait la construction de ses CanAm pour les États-Unis à l’usine Trojan de Peter Hagg, par ailleurs importateur Suzuki. Trois ingénieurs de chez McLaren vont concevoir pour Hagg un étonnant cadre coque en tôle d’aluminium rivetée et té de fourche en magnésium. Fort de ces technologies de F1 appliquées au trial, Peter Hagg construisit en 1971, 71 exemplaires de cette moto de 71 kg que pilota John Hemingway.

L’Alta, dérivée comme la McLaren et la Gaunt de la Suzuki TC120 a, quant à elle, conservé la cylindrée originale de 118 cm3. Une centaine en fut construite par le fermier trialiste, Keith Taykor qui les vendait en kit (pour bénéficier d’un taux de TVA réduit en Grande-Bretagne). L’Alta s’illustra aux mains de Martin Lampkins en remportant le Welsch Trials en et en finissant 14e au Scottish 6 Days en 1970. (Lampkins sera ensuite champion du monde sur Bultaco en 1975). On pouvait aussi admirer sur le stand la Yamaha 250 TYZ de présérie en 1992 ex Christophe Camozzi, la Yamaha OW10 (YZT250) de 1974 prototype cantilever de Mike Andrews vainqueur des 6 jours d’Écosse et le proto de la 360 TY réalisé en 1972 pour Sonauto Yamaha par Christian Rayer. Voilà pour les statiques, mais il y avait aussi un trial indoor à l’ancienne où on retrouvait le même Christian Rayer et pas mal d’autres avec des machines moins rares sans doute, mais tout aussi d’époque qui tournaient sans discontinuer.

RMCE

RMCE : Rétro Moto Cycles de l’Est. Que ce soit à Lyon, aux coupes Moto Légende, à l’ASI Motor Show, ou dans la plupart des grandes manifestations, le Rétro Motocycle Club de l’Est est toujours là et en force avec ses motos et une organisation impressionnante. Pour ce Salon du 2 Roues, Denis Fleury, le président, et sa bande étaient venus avec six camionnettes attelées de remorques et 38 motos britanniques, comme demandé par l’organisateur. Parmi celles exposées sur le stand du club on remarquait entre autres trois rares Triumph, une 500 TR5 Trophy de 1953 (1), une 500 T100 de 1956 (2) et une 350 H monocylindre de 1946 (3), une Matchless 500 G45 (4) bicylindre compé-client de 1954, une Ariel 1000 Square Four bitube de 1949 (5), etc.

Le RMCE avait aussi fourni le stand “moderne” de BSA qui présentait la nouvelle 650 Gold Star made in India par Mahindra entourée d’une demi-douzaine de vraies Anglaises made in Birmingham : une BSA 500 Gold Star (6) qui paraissait toute frêle aux côtés de la nouvelle nettement plus empâtée, une BSA 750 Rocket de 1969, et quatre générations de 650 bicylindres.

Unik et Green Racing Team

Le Green Racing Team (1 & 2), comme son nom le laisse supposer, s’intéresse surtout aux belles Anglaises de course, mais pas que, car deux/trois Ducati trouvaient place parmi les 18 motos exposées.

La même équipe de Pascal Dietsche et Bernard “Nabs” Bressat exposait les “Uniks”, de délirantes réalisations concoctées, sans doute, durant leurs durs hivers aux portes nord du Vercors. En vedette, une Nimbus (3) revue et corrigée avec l’adoption d’un compresseur et un échappement libre qui doivent exciter les sens de cette Danoise placide. Derrière elle, on aperçoit une 750 twin Triumph T 140 (3) qui s’est payé le luxe d’une culasse à double ACT issue du tronçonnage d’un haut moteur d’une Triumph trois cylindres récente. Autres “petits” bricolages, une Brough Superior SS80 de 1938 (4) à moteur Matchless à soupapes latérales reconstituée à partir de pièces éparses et dotée d’un compresseur qui devrait l’aider à réitérer le record de vitesse battu en 1938 par une SS80 similaire à 192 km/h sur la nationale 20 dans la grande ligne droite d’Arpajon. On continue avec deux Triumph T100 (5), celle photographiée, très modifiée avec un compteur dans le réservoir, l’autre façon scrambler dans un cadre Métisse et puis, pour terminer, une T 140 revue sauce flat track… et bien évidemment, tout ça roule !

Harley-Davidson

Harley Davidson, comme BSA et BMW (que j’ai un peu oublié, car on connaît déjà si bien les machines de son histoire), exposait côte à côte ses dernières productions et celles de son histoire. Une bien belle initiative qui sera, je l’espère, bientôt suivie par les autres constructeurs dans ce salon dédié aux anciennes comme aux modernes.

Pour le côté historique, Harley Davidson avait fait appel aux formidables talents de Jean-Luc Gaignard, un artiste en “sortie-de-grangisation” ! Détaillez donc cette HD 1000 de 1914 (1 à 4) qui semble tout droit sortie d’un de ces grands raids dont raffolaient les Américains. Une version de 1919 de la célèbre 1000, la type L19T(5) était, elle aussi dans son jus d’origine et vous admirerez la présentation de l’ensemble du stand. Comme neuve, mais pas surrestaurée comme trop souvent outre-Atlantique, ce rarissime monocylindre 600 cm3 type 16 de 1916 (6) semblait prêt à prendre la route avec son mannequin mécanicien ou d’ailleurs avec le délégué de la marque à la garde du stand qui, en habits d’époque, jouait aussi volontiers au mannequin. Originale, cette 350 BA de 1929 (7), monocylindre culbutée surnommée “Peas shooter”, la cracheuse de petits pois à cause de son bruit d’échappement, pourrait presque passer pour une moto européenne.  Aux côtés de ces modèles restaurés avec leur patine, l’Harley 492 cm3 de 1903 (8) paraissait trop neuve, mais elle avait une histoire : il s’agit d’une des huit répliques réalisées par l’usine et expédiées sur leurs différents marchés pour la commémoration du centenaire de la marque.

et en vrac…

Plus de 1000 motos anciennes, vous vous en doutez, je ne vais pas vous les montrer toutes, alors voilà en vrac quelques clichés de machines qui m’ont interpellé au fil de mes 14 km. Impressionnant, le grand stand du Yamaha Racing Heritage Club, sous l’égide d’Hubert Rigal, fêtait dignement le cinquantenaire de la TZ avec la quasi-totalité des modèles produits depuis 1973 en 125, 250, 350, 500, 700 et 750. (1 et 2)

Je ne me suis pas trop attardé ni sur les 50 ni sur les motos de compétition, il y avait pourtant beaucoup à voir… Le Suzuki 50 RM64 (3) qui fut champion du Monde avec Hugh Andersson en 1963 et 64. Une puce de 60 kg qui délivrait 12,5 ch à 14000 tr/min, et atteignait 162 km/h grace à sa boîte à 14 rapports. Le Tomos 50 Matulja DMGP de 1979 (4) atteint la vitesse incroyable pour un 50 de 204 km/h avec ce carénage aérodynamique. Une superbe Velocette 500 MSS Super Sport de 1950 (5), et une CZ 250 Bitubes de 1964 (6) apportées par le musée de la moto d’Henri Sabatier à Cucuron. On continue notre tour d’Europe avec une Hongroise qui attend à être mise aux enchères, la Cespel 125 D Danuvia de 1955 (7), une Portugaise, la Casal 50 FL Diana de 1967 (8) dont on ne peut qu’admirer le logo avec la Diane chasseresse. Enfin, un Belge, pour finir avec ce cyclomoteur Claeys Flandria 50 FL de 1952 (9), une sorte de Solex inversé.

En deux jours, j'ai piétiné 14 km et je n'ai même pas tout vu, mais je vais tenter de vous donner un aperçu de ce qui le plus plu. Ce qu'il y a d'extraordinaire dans ce Salon du 2 Roues, c'est que nos motos anciennes y sont totalement dépoussiérées. J'étais plutôt septique au départ sur [...]

Salon du 2 roues à Lyon #1: le centenaire de Motobécane

Formidable ! Année après année le salon du 2 roues à Lyon s’affirme comme un évènement incontournable tant pour la moto moderne que pour les anciennes qui nous occupent ici et qui étaient très largement représentées par plus d’un millier de machines. À tout seigneur, tout honneur, l’expo vedette était cette année consacrée au centenaire de Motobécane qui, sans mollir, avait apporté (pour être bien sûr d’en avoir cent) 114 machines représentatives de l’histoire de la marque. Revue de détail au pas de course et à très bientôt pour la découverte des autres anciennes au salon.

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Les avant-guerre

Celles par qui tout a commencé, les 175 MB1 de 1923 en version homme et dame ou ecclésiastique.

Motobécane monte en cylindrée avec cette 250 type E de 1926 à transmission secondaire par chaîne et boîte 3 vitesses Albion.

Cette 308 F4 de 1928 inaugure le réservoir en selle avec le sublime décor “tortue” style art déco. Il est dû à Géo Ham qui restera jusque dans l’immédiat après guerre le styliste attitré de Motobécane et sans doute le premier designer au sens actuel du terme car, très vite, il sera en charge, dès la conception d’un modèle, de la création des formes englobant la mécanique.

Premier quatre temps en 1929 avec cette 250 M2 à moteur JAP et soupapes latérales.

Motobécane monte en gamme, et cette fois encore avec un moteur britannique, un Blackburne à soupapes culbutées qui équipe cette 500 H2 de 1929. Il est surmonté, comme la 250, par le fameux réservoir “tortue”.

Motobécane offrira dans les années trente des 350 et 500 cm3, à deux ou quatre soupapes par cylindre qui se comptent parmi les plus belles motos françaises de notre histoire.

En vedette, cette 500 S5C Grand Sport à quatre soupapes de 1934 qui osa ce beau jaune éclatant avec le décor “flames” de Géo Ham.

Bien qu’elles n’aient pas été suivies d’une réelle commercialisation, Motobécane se fait aussi remarquer par de formidables quatre cylindres en long à transmission par arbre. La première, la 500 B5 à soupapes latérales apparait en 1929 et la firme de Pantin présente en 1930 cette 750 à arbre à cames en tête baptisée B7 chez Motobécane et T7 sous label Motoconfort.

Motobécane lance son premier « compé-client » en 1934 avec cette prestigieuse moto de compétition la 500 B5 C Grand Sport (ici T5 en Motoconfort) à culasse à 4 soupapes et piston haute compression capable d’un bon 130 km/h. Elle remporta une médaille d’or aux Six Jours en 1931 pilotée par Lovenfosse et fut victorieuse au Bol d’or 1932.

L’entre-deux

La lignée des 350 et 500 Superculasse d’avant-guerre (basée sur le bloc S avec des soupapes totalement enfermées dans un très volumineux haut moteur) se perpétue de 1948 à 50 avec la Superculasse R46C 350 monotube. On aperçoit derrière elle, une version en 500 cm3 à double échappement et cadre modifié prévue pour équiper l’administration qui finalement n’en voulut point.

Après avoir développé la 350 V4C en 1947, animée par un moteur bicylindre en V à 60° qui resta un prototype, Eric Jaulmes et Ernst Drucker, les responsables techniques de la marque, créent cette 350 L4C à cylindres parallèles beaucoup plus économique à réaliser avec son bloc cylindre et sa culasse unique. Elle est produite de 1953 à 1960.

A droite la Z24C de 1955, la 175 la plus économique de la gamme, et, à droite la Z2C de 1954 avec son beau réservoir chromé.

Le grand tourisme à la française dans les années 50, c’était cette Motobécane 125 Z56C Mobyclub de 1956.

En renforçant un peu sa mécanique et en dotant ses modèles d’un bel habillage sport avec réservoir Mottaz et bulle de phare, Motobécane s’attaqua à faible frais à la moto sportive avec ses 125 et 175 ZS sans toutefois concurrencer la Morini qui l’inspira, ni même les Terrot 125 Tenor et 175 Super Ténor et Rallye sorties un an plus tard.

Motobécane a raté son entrée dans le monde du scooter en 1953 avec le Mobyscoot 125 SC (au fond sur la photo) à moteur 4 temps victime de graves problèmes techniques. La marque s’est bien rattrapée ensuite avec la gamme des scooters Moby à moteur deux temps. Ici en tête de gondole, le 125 SBS “Mobyscooter” Montagne de 1957.

Dans les années 50, la direction de Motobécane était systématiquement contre la compétition. Grace à la passion de certains membres du personnel et de Christian Christophe, éternel consultant de la marque, on vit toutefois nombre de 125/175 modifiées courir dans la discipline, alors nouvelle, du trial. La 125 présentée, qui a participé à différentes compétitions de trial dans la région parisienne, a été conçue par Christian Christophe avec des pièces de récupération, moteur du scooter SB et fourche télescopique suspendue à l’aide d’anneaux Neiman.

Les Mobylettes

Avant la Mobylette, Motobécane n’était qu’une des grandes marques de motos françaises. Grace à cette Mobylette, elle va devenir, et pour longtemps, le plus grand producteur mondial de deux roues motorisés. L’histoire débute en 1949 avec la version AV3 présentée au salon 1949 qui ne diffère du modèle photographié que par son phare profilé courant sur le garde-boue avant.

Avec la Mobylette AV43 présentée en 1959, dix ans après la première Mobylette, Motobécane abandonne le cadre en tubes pour un cadre fin en tôle emboutie.

“La Bleue”, celle qui deviendra l’archétype des Mobylette avec son cadre coque-réservoir de 5 litres en tôle emboutie est présentée au salon d’octobre 1956 et développée au cours de l’année suivante avec les AV 78 (suspension arrière coulissante et variateur), 79 (sans suspension, avec variateur), 75 (avec suspension sans vario) et la AV 76 ici photographiée, sans variateur ni suspension arrière. Pour la petite histoire, j’ai fait mes premières armes sur la même.

L’histoire de la Mobylette débute avec une noire, explose avec les “Bleues” puis termine en beauté avec cette AV89 de 1960, la GT des Mob avec sa fourche Earles (bientôt remplacée par une télescopique), un double variateur et une chaîne enclose.

Bon, celle ci n’est pas de série, et la photo n’est pas prise sur l’expo Motobécane, mais elle prouve, oh combien, que la “Bleue” fait toujours rêver et plus encore avec deux cylindres supplémentaires greffés par de sacrés bricoleurs chez Stokey.

Les Mobylette, ce sont aussi les “Spéciales” et la première du nom qui fait rêver tous les collectionneurs, est cette SP de 1960, une beauté !

La spéciale présentée en 1962 est moins aguichante, mais fort novatrice. Cette rarissime Spéciale route (SPR) est en effet l’un des premiers deux roues au monde à adopter un allumage électronique dû à Novi, filiale de Motobécane.

Une petite dernière pour la route… euh, non, pour le tout terrain, avec la Spéciale TT de 1966 à simple variateur et 2 chaînes en attendant la 94 TT de 1968 à double variateur et chaîne unique. Elle sera suivie, en 1978 par la 95 TT équipée du moteur à contre piston.

J’ai éclaté de rire en redécouvrant ce modèle de pré-série de la 51 qui servit aux essais presse en 1978 … et je le prouve, au guidon de cette même machine dans les rues de Pantin lors de cette excitante présentation !

On reste dans le vert avec cet étonnant prototype de 1981 remis en état par Marc Descours, un Mobyx X7 équipé d’une injection électronique et d’un graissage séparé. Un équipement sans doute encore trop fragile, trop cher et surtout trop complexe à entretenir par le réseau mais quel dommage que Motobécane ait raté ce virage technologique qui l’eut mis à égalité face aux Japonais.

La Mobylette qui commença sa longue carrière dans l’utilitaire, la termina sur les circuits avec des Mobs poussées dans leurs derniers retranchements comme cette 51 CF de 2005.

Non, ce n’est pas une Mobylette et aussi incongru que cela puisse paraître sur ce site, il s’agit bien d’une automobile. Motobécane, bien conscient que le 50 cm3 utilitaire finissait son âge d’or, travailla sur une voiturette à moteur deux temps puis sur cette KM2V, beaucoup plus aboutie, animée par un quatre cylindres quatre temps maison de 300 cm3 à simple ACT disposé transversalement. Le projet, m’expliquait le directeur technique de Motobécane, Eric Jaulme, fut “tué” par les grandes marques automobiles qui menacèrent leurs équipementiers de rompre leurs contrats si elles fournissaient Motobécane. Cette version de 1965 récemment restaurée est exposée au musée de Saint-Quentin.

Retour aux motos

Alleluia ! En octobre 1969 Motobécane annonce son retour à la moto avec la 125 DC bicylindre deux temps (au premier plan), doublée en 1970 par la version L dotée d’une batterie dans un coffre sous le filtre à air (derrière) puis la LT 1 et la LT2 en 73 (au fond) avec une culasse anguleuse et le graissage séparé en plus pour la LT2.

En 1975 apparaît cette 125 LT3 à l’esthétique totalement revue et frein avant à disque qui sera vendue jusqu’en 1980 et même proposée à l’armée… sans suite. Cette année là, à Moto Journal, où j’étais chef des essais, la LT3 s’est révélée la plus rapide face aux Yamaha et Suzuki… mais à condition toutefois de ne rater aucune vitesse !

En 1972, enfin, Motobécane se laisse convaincre et revient sur les circuits avec cette 125 S à cadre RAI préparée par Charles Marandet. En 1976, l’usine construira 500 unités d’une 125 LT3  spécialement préparée pour la coupe Motobécane-Moto Revue (au second plan).

Motobécane travaille en 1975 sur un monocylindre prototype destiné à tester l’injection pour la 350 dont il emprunte l’un des cylindres, ce qui en fait un 118 cm3. Cette moto sera proposée à l’armée qui une fois encore ne sera pas séduite. Ce prototype a été remis en état ces dernières années par Marc Descours.

Alors que les premières 350 tricylindres ont été livrées au début de 1973, Eric Jaulmes, passionné par l’électronique et les nouvelles technologies, travaille déjà sur l’injection dans les ateliers de Pantin et la 350 injection que j’ai eu le privilège d’essayer est présentée au salon de Paris d’octobre 1973 suivie en 1974 d’une 500 Injection qui n’était qu’une maquette non opérationnelle.

Evidemment, une 350 cm3 française ne pouvait que donner des envies de préparation pour la course. Une première mouture destinée aux Grand Prix  est concoctée par Eric Offenstadt avec un cadre coque en 1974, suivie par cette version dans un cadre plus conventionnel développée par Bernard Fargue et Marcel Garcia. L’usine préférant se concentrer sur les 125, elle ne participera à aucune course.

Autre bel essai, lui aussi resté sans suite, cette 350 construite par Yves Kerlo et Jean-Pierre Camino pour le Paris-Abidjan-Nice en 1976 qui abandonnera au début de la première étape à la suite, semble-t-il, d’une organisation… fantaisiste.

… et à très vite pour la suite en images de la visite de ce salon du 2 roues.

FMD

Formidable ! Année après année le salon du 2 roues à Lyon s'affirme comme un évènement incontournable tant pour la moto moderne que pour les anciennes qui nous occupent ici et qui étaient très largement représentées par plus d'un millier de machines. À tout seigneur, tout honneur, l'expo vedette était cette année consacrée au centenaire [...]

Carnets de voyage d’Albert 1er de Monaco

On voit rarement des têtes couronnées ou princières s’illustrer par leurs exploits motocyclistes (bien que nous ayons eu un président qui fit beaucoup parler de lui sur son trois roues MP3) et c’est avec une grande fierté que la Principauté de Monaco publie (sous forme informatique et sur papier) un livret consacré aux nombreux voyages à moto du Prince Albert 1er, un véritable pionnier en la matière, qui s’illustra en particulier par trois Paris-Monaco en 1903, 1904 et 1905.

L’article “Carnets de voyage d’Albert 1er de Monaco” sous-titré : Le « tour de France » d’un prince motocycliste à la Belle Époque est paru dans le N° 46 des annales monégasques. L’auteur, Michaël Bloche, conservateur du patrimoine et directeur de la Mission de préfiguration des Archives nationales de Monaco”, a effectué un colossal travail d’historien (normal, c’est son métier !) en rassemblant les archives et photos de la principauté et, surtout, tous les journaux tenus par Albert 1er, qui sont un exceptionnel et unique témoignage en langue française des multiples difficultés rencontrées dans les premières années du siècle dernier par les voyageurs au long cours à moto. Albert 1er raconte dans ses notes ses équipées de 1901 à 1919 avec divers types de vélocipèdes (avec quand même un parcours de 150 km en tandem Clément en octobre 1894), et surtout des motos et side-cars.

Avec une dignité toute princière, Albert 1er dans les jardins du Palais sur une Autocyclette Clément monocylindre vers 1901. N’allez pas croire pour autant que S.A.S. ne tournait qu’autour des massifs, c’était seulement le seul endroit où l’attendait le photographe car il effectuait ses voyages en solitaire. (archives Palais de Monaco)

On se rappellera surtout des 3 Monaco-Paris réalisés par le Prince sur sa Humber Beeston 350 cm3 en 1903, 1904 et 1905, avec parfois de grands détours par le Sud-Ouest, la Suisse, l’est de la France, etc. Le prince eut au moins 7 motocyclettes, dont plusieurs Humber, une Motobiciclette Peugeot achetée en 1902 (872,30 F !), un side-car Rover 500 cm3 et des Autocyclettes Clément mono et bicylindre.

Ses fameux Monaco-Paris duraient une à deux semaines, toujours au mois de mai et souvent en solitaire et incognito, avec un mécanicien qui le suivait en général quelques heures derrière. Albert 1er est surtout connu pour ses explorations marines, mais il pratiqua la motocyclette jusqu’à la toute fin de sa vie, par goût de l’effort physique, de l’aventure, du pilotage et de la vitesse, de la mécanique, pour le sentiment de liberté et évasion que cela lui procurait.

Toujours autour du Palais avec cette fois sa Humber Beeston de 1903 photographiée par Charles Chusseau-Flaviens au début de 1905. (archives Palais de Monaco)

Le livret de 175 pages concocté par Michaël Bloche est très abondamment illustré d’une soixantaine de photos d’époque et de nombreuses reproductions de notes, cartes et documents. Il est en vente sous forme papier et en ligne, intégralement ou article par article (3 euros pour l’article de Michaël Bloche), sur le site des Annales monégasques : version papier 30 €, version PDF 10 €.

Les journaux scrupuleusement tenus par Albert 1er sont un témoignage unique des difficultés rencontrées alors par les motocyclistes. (extrait des Annales monégasques)

On voit rarement des têtes couronnées ou princières s'illustrer par leurs exploits motocyclistes (bien que nous ayons eu un président qui fit beaucoup parler de lui sur son trois roues MP3) et c'est avec une grande fierté que la Principauté de Monaco publie (sous forme informatique et sur papier) un livret consacré aux nombreux voyages [...]

Retour sur Rétromobile 2023

Il y avait beaucoup de dollars à Rétromobile, mais pas que et voici un bref retour en images et absolument pas exhaustif de ce qui m’a marqué au fil des stands.

Je suis séduit à chaque Rétromobile par le stand Etampe moderne et sportive tenu par Emmanuel Lopez. Des affiches à ne plus savoir qu’en faire et toute la collec des lithos de Géo Ham (à un millier d’euros pièces quand même). En vedette autour du stand l’affiche de Max Monty pour Automoto en 1930, celle de Marcello Nizzoli pour Léon Houard concessionnaire des motos FN à Gand et une fort belle ACE dont je ne connais pas l’auteur.

Un sublime Ducati Cucciolo 48 cm3 dans une version très spéciale conçue par l’ingénieur Bibertti en 1956 et construite à 5 exemplaires seulement. Le cadre double berceau en profilés très fins de tôle emboutie. Une spécificité qui a son prix 6000 € annoncés par le vendeur italien l’Officine Cantelli de Bologne.

Petite présentation sympa d’une Norton Manx surmontée d’une affiche pour le Grand Prix de Pau avec la 500 Gilera-4.

La Corona présentée sur le stand du Vintage Revival, une 3 HP à soupape d’admission automatique, est le seul monocylindre connu. Corona Fahrradwerke était l’une des usines les plus renommées du Brandebourg. Le mécanicien Adolf Schmidt y fonda en 1891 une petite usine de bicyclettes et pièces auto et motos. L’usine Corona se lance dans la production de motos vers 1902 avec des moteurs Fafnir ou Antoine.Leur production s’arrète avec le début de la première guerre mondiale, mais la marque renaît au début des années 20 avec la construction d’une moto bicylindre de 350 cm3 produite jusqu’en 1925.

 

Une Scott bien spéciale aussi sur le même stand toujours riche en grandes raretés du Vintage Revival : cette Scott Sociable à trois roues de 1924, sorte de side-car entièrement carrossé posé sur un étonnant châssis multitubulaire. Cet engin étonnant fut, à l’origine conçu pendant la Première Guerre mondiale par Alfred Angus Scott pour l’armée qui n’en voulut point, Il tenta donc (sans grand succès, malheureusement) de rentabiliser son étude en commercialisant, en 1916, une version civilisée et sans sa belle mitrailleuse, Le Sociable ainsi né devint cette élégante et atypique voiturette bitrace. Le Sociable n’arriva malheureusement sur le marché qu’en 1921 et ne put soutenir la concurrence face à l’Austin Seven. Affiché à 273 £ lors de sa sortie, il ne valait plus que 135 £ en 1924 et il ne s’en vendit que 200 exemplaires. La roue avant directrice est actionnée par volant, pignon et crémaillère. La boîte de vitesses est à trois rapports sans marche arrière avec transmission à la roue arrière par un arbre.

L'exemplaire un poil spécial présenté avait un double allumage donc deux magnétos et deux bougies par cylindres auxquelles un bricoleur britannique facécieux avait rajouté une troisième bougie soit six en tout !

Officina Meccanica Guazzoni a été fondée à Milan en 1935 par Aldo Guazzoni, un mécanicien et concessionnaire de 27 ans. Il lance en 1950 la production d’un monocylindre de 150 cm3 à deux temps construit sur commande par la firme FBM de Bologne. Le modèle 150 SV de 1951 présenté ici était proposé à  5900 €… négociables

Une moto chez Peugeot, c’est mieux que rien du tout, mais la marque au lion n’a pas été bien loin dans ses réserves pour présenter la 515 des records de 1934, certes spectaculaire mais si souvent vue…

Il aurait été inconvenant que Rétromobile laisse une si large à la commémoration du centenaire des motos Dollar, sans au moins citer celui de Motobécane. Le stand de la FFVE a heureusement remédié à cela en attendant la formidable expo des cent ans de Motos bécane à venir au salon du 2 roues à Lyon et à Saint Quentin les 10 et 11 juin.

Il y avait beaucoup de dollars à Rétromobile, mais pas que et voici un bref retour en images et absolument pas exhaustif de ce qui m'a marqué au fil des stands. Je suis séduit à chaque Rétromobile par le stand Etampe moderne et sportive tenu par Emmanuel Lopez. Des affiches à ne plus savoir qu'en [...]

100 ans de Dollar à Rétromobile

Dollar, une marque américaine ? Et bien non c’est une marque de moto bien française qui débuta en fabriquant des boîtes aux lettres pour la Poste et des serrures et cadenas pour Vuitton.

En 1923, Vuitton est déjà bien implanté aux Etats-Unis où on paie alors avec la fameuse pièce du Dollar-or à tête d’indien. De là viendrait, dit-on, l’origine du nom choisi pour la marque nouvellement créée par les Ets Delachanal et la SAVAVA de Georges Vuitton.

L’Amicale Dollar rassemble de façon à peu près stable environ 70 membres et 220 motos depuis sa création en 1997 par Jean-Michel Madranges. Il est toujours l’actuel président, assisté entre autres par Bernard Knapp, trésorier de l’association et organisateur avec Thierry Farges de cette exposition pour fêter le centenaire de la marque, à laquelle j’ai aussi très modestement participé. Les 20 motos exposées à ce Rétromobile 2023 représentaient toute la production de Dollar à l’exception des Majestic passées dans le giron de la marque en 1930 et de la mythique 750 quatre cylindres, vedette des salons des années trente dont on ne connaît que deux survivantes, l’une malheureusement indisponible et l’autre en cours de restauration.

L’histoire d’une marque, mais aussi celle d’un club avec une moto “sortie de grange” telle qu’on les trouve souvent et une autre qui vit son premier salon après une longue restauration. (à gauche une 500 S2 de 1930 et à droite une 350 R4 de 1931 et en vignette en haut à gauche, Jean-Michel Madrange, le président, en train de compulser ses dossiers pour répondre à une question).

Dollar, Foucher-Delachanal, Omnium métallurgique, SAVAVA, Vuitton, Majestic, Chaise, Moser, MAG… ces quelques noms résument toute l’histoire de la marque, et je laisse Bernard Knapp vous expliquer les liens entre eux.

Vers 1890 Eugène Foucher et Jean-Louis Delachanal, serruriers, fabricants de machines à coudre et de cycles s’associent en créant la marque Omnium. Leur première et éphémère réalisation mécanique est, en 1896, une voiturette bicylindre à pétrole avec laquelle ils tentent de participer à la course Paris-Marseille-Paris.

Grand chambardement au changement de siècle. Eugêne Foucher passe la main à son gendre Jean-Louis Delachanal et l’entreprise, trop à l’étroit à Paris, part s’installer à Charenton-le-Pont, car elle vient de remporter le très juteux marché de ces belles boîtes aux lettres en fonderie lancé par le préfet Mougeot (d’où leur surnom de mougeottes). L’Omnium continue parallèlement ses activités de serrurerie et la construction de bicyclettes et d’accessoires sous les marques Omnium et Spencer. Jean-Louis Delachanal décède en 1920, ses filles prennent la suite et, en février 1921, les Ets Delachanal fusionnent et lient leur nom avec la SAVAVA (société anonyme pour l’Achat et la Vente d’Articles de Voyages et Accessoires), une société créée par Georges et Gaston Vuitton (fils et petit fils de Louis, le créateur) à qui Delachanal vend serrures et cadenas.

De la serrurerie et du vélo à la moto, le pas est facile à franchir, car l’outil industriel est le même. Et, comme, le rêve est américain en ces années de l’immédiat après-guerre, les motos construites par Delachanal s’appelleront Dollar et se pareront même d’une tête d’indien pour faire plus vrai.

Comme la très grande majorité des marques françaises et étrangères de l’époque qui se comptent par centaines, Dollar est un constructeur-assembleur qui ne fabrique que ses cadres, garde-boue et divers accessoires et s’approvisionne pour le moteur, les roues, les freins et les accessoires auprès de fournisseurs spécialisés.

La première moto Dollar, présentée  au salon de Paris de 1923, est une 125 cm3 à moteur Moser, une mécanique économique, mais à la pointe du progrès en étant le seul quatre temps à soupapes culbutées sur le marché dans cette cylindrée et qui plus est en bloc moteur-boîte deux vitesses. Deux ans plus tard, Dollar ne présente pas moins de sept motos au salon avec des cylindrées et des finitions différentes, et même un tandem et un triporteur. Fin 1927, l’usine déménage dans de plus vastes locaux quai de la marne, à Joinville-le-Pont. Le moment est, hélas, mal choisi , la population en âge d’acheter une moto a baissé suite à la guerre, les matières premières augmentent avec la crise financière de 1929, et les Ets Delachanal ne peuvent assumer les coûts de la nouvelle usine et la fabrication d’une très large gamme avec des modèles de 175, 250, 350 et 500 cm3.

En décembre 1930, la marque est absorbée par l’Omnium Métallurgique et Industriel auprès de laquelle elle est fortement endettée, car c’est elle qui produit les moteurs Chaise équipant la quasi-totalité de la gamme Dollar. Dollar devient du coup l’un des rares constructeurs à part entière puisque les moteurs sortent de la même maison. On espère alors un grand renouveau, d’autant plus que ce rapprochement des deux entreprises s’est déjà traduit au salon de Paris 1930 par la présentation d’un fabuleux prototype 500 cm3 quatre cylindres suivi par une 750 en 1933 qui ne sera hélas produite qu’à une petite dizaine d’exemplaires. L’O.M.I. a également racheté Majestic à leur créateur Georges Roy et les premiers prospectus ont d’ailleurs rebaptisé ces motos Royal-Dollar, mais les formidables Majestic produites de 1930 à 1933 garderont pourtant leur appellation originelle. En 1936, les mouvements sociaux fragilisent une fois de plus l’entreprise qui est contrainte de cesser la production des motos Dollar, mais l’O.M.I. poursuivra néanmoins la fourniture de pièces détachées jusqu’en 1955 dans ses locaux de la rue Auguste Lançon à Paris.

L’aventure continue aujourd’hui avec l’Amicale Dollar et avec l’aide de professionnels passionnés de la moto ancienne comme Paulik Motor (Gresse-en-Vercors 38650) et Chambrier père et fils qui refabriquent de très nombreuses pièces.

Comme toutes les belles histoires, celle de Dollar commence par des succès sportifs, ici avec Druz sur la 175 cm3 à transmission directe vers 1924 à la course de côte d’Argenteuil.

La version 125 BT de 1926 à boîte deux vitesses, transmission par courroie à la roue arrière et suspension avant par fourche oscillante appuyée sur ressorts à lames.

Toujours le petit moteur Moser à soupapes parallèles commandées par tiges et culbuteurs, mais sur cette 175 C de 1925, la boîte 2 vitesses Albion est séparée, la transmission primaire est à chaîne et la secondaire par courroie.

La 175 Dollar à moteur Moser continue d’évoluer en 1926 avec cette version DSC à transmissions primaire et secondaire par chaînes, une boîte française Staub à 3 rapports et une fourche avant à parallélogramme type Webb à ressort central.

1927 : Dollar choisit (presque) définitivement son motoriste, Chaise, avec ce 170 cm3 type I doté d’une boîte Staub 2 rapports. Trois ans plus tard sera présenté une BMA (bicyclette à moteur auxiliaire) également animée par un Chaise deux temps de 100 cm3 et monovitesse. Ce seront les seul deux temps réalisés par Chaise.

Les choses vraiment sérieuses commencent avec cette 500 L de 1928 à moteur Chaise, bien sur, et arbre à cames en tête entraîné par arbre et couples coniques. Merci au passage à Moto Magazine (reportage Dollar à suivre dans le prochain numéro) qui m’a gentiment laissé l’usage de son fond blanc et de ses éclairages. C’est quand même bien les photos façon pro !

Encore une ACT avec cette 500 LSS de 1929. Pour les nuls en Chaise, on reconnait facilement les version à ACT car l’angle inférieur avant droit du carter contient une pompe à huile qui est absente sur les modèles suivants à soupapes culbutées.

Une rare 250 P de 1929, fignolée dans ses moindres détails comme toutes les Dollar, comme on peut en juger par son feu arrière en vignette.

Toujours en 1929, une superbe 350 KSS à moteur Chaise ACT.

1930 : l’O.M.I. édite ce prospectus présentant sous l’appellation “Royal Dollar”, la Majestic dont il vient d’acquérir les droits. Le nom sera utilisé très brièvement sur une 350 standard, mais les Majestic conserveront leur nom d’origine jusqu’en 1933.

Pour ses modèles les plus sportifs Dollar fit (rarement) quelques infidélités aux moteurs Chaise. Cette rarissime 350 Y de 1931 est ainsi équipée d’un moteur suisse MAG. On y remarque également l’apparition du fameux cadre Dollar dont la poutre supérieure et le tirant avant sont en acier matricé. Sur la 350 R4 de 1931 présentée un peu plus bas, la partie arrière du cadre et même la béquille sont ainsi construits.

Freins Perrot Piganeau : Henri Perrot ingénieur français pionnier de l’automobile débute en 1902 chez Brazier et dépose en 1910 ses premiers brevets sur les freins, un domaine qui le passionnera jusqu’à sa fin d’activité en 1956.  Entre autres multiples réalisations, sa société Perrot & Piganeau 32-38 rue de Sanzillon à Clichy (qui deviendra Bendix en 1936) commercialise au tout début des années trente des tambours de freins pour moto utilisant le système de servo-frein Perrot Piganeau. Un Dispositif plutôt efficace avec trois cames de frein et un tout petit levier de commande caractéristique. Une autre particularité qui peut surprendre est que ces freins ne fonctionnent qu’en marche avant. Attention en descendant votre moto de la remorque !!

Le coeur de la gamme la 350 R3 à moteur Chaise culbuté était également disponible avec l’onéreuse option : transmission par arbre comme ici sur la machine de Gérard. Car oui, j’ai oublié de vous le dire, la plupart des propriétaires de ces belles Dollar avaient accompagné leur progéniture sur le stand.

La même, quelques mois auparavant !

La plus luxueuse de toutes, cette 350 R4 de 1931, brillant de tous ses chromes faisait sa première apparition publique à Rétromobile après quelques années d’un long travail de restauration de la part de Thibault, son jeune propriétaire trentenaire. Et on en profite pour noter avec plaisir qu’à l’Amicale Dollar comme à celle réunissant les René Gillet, chez Terrot et quelques autres tous les collectionneurs restaurateurs n’ont pas les cheveux blancs, loin de là. 

Terminons cette longue visite avec la sportive Dollar 500 S4S de 1933 présentée par Francis, son heureux propriétaire et dotée de formidables sorties d’échappement filetées en aluminium et de pots relevés.

Dollar, une marque américaine ? Et bien non c'est une marque de moto bien française qui débuta en fabriquant des boîtes aux lettres pour la Poste et des serrures et cadenas pour Vuitton. En 1923, Vuitton est déjà bien implanté aux Etats-Unis où on paie alors avec la fameuse pièce du Dollar-or à tête d'indien. [...]